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Années noires

La tradition voulait que le nouveau Premier ministre canadien fasse son premier voyage à Washington pour rencontrer le président américain. Les choses ont changé. Mark Carney a choisi cette fois de venir en Europe. Il a atterri lundi à Paris, préférant rencontrer des «alliés fiables» et respectueux plutôt que de serrer la main à celui qui veut annexer son pays et le transformer en 51e État. On le comprend parfaitement.

La stratégie du choc de Donald Trump a bouleversé les équilibres mondiaux. Et ce n’est pas terminé. Les coups de boutoir vont se poursuivre pour rendre, prétendument, sa grandeur à l’Amérique. Et les anciennes alliances vont continuer à vaciller. Nous n’en sommes qu’au début du mandat du milliardaire incontrôlable. Les dégâts sont déjà conséquents. Et ils risquent de marquer les esprits bien après son départ de la Maison-Blanche. Ceux qui croient encore en la valeur morale des États-Unis en Europe sont complètement démunis. Ils n’ont plus personne de l’autre côté de l’Atlantique à qui se raccrocher. Il ne leur reste plus à croire qu’à un possible futur moins chaotique lorsque l’homme du Bureau ovale devra quitter les lieux. Il ne semble n’y avoir plus aucune grande voix démocrate pour tenir tête au seigneur de Mar-a-Lago. L’opposition américaine est toujours comme sonnée de la défaite électorale de novembre. Les décisions du président concernant les limogeages de hauts fonctionnaires, de généraux dans les états-majors, de milliers de fonctionnaires sont d’une telle violence que les adversaires de Trump en restent bouche bée. Pourtant, c’est maintenant qu’on devrait les entendre. Il y a évidemment des mouvements de contestation, mais ils sont pour l’instant bien timides. La casse va continuer. À ce rythme, les actions du président américain risquent de provoquer une défiance vis-à-vis des États-Unis jamais encore connue sur notre continent.

Aujourd’hui, le Premier ministre canadien est donc en Europe où il vient rencontrer ses «vrais» alliés, ceux sur qui il peut compter, ceux avec qui il peut se disputer sans remettre en cause leur amitié. Un concept qui n’existe plus depuis le 20 janvier dernier aux États-Unis. 2028, c’est loin…