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Amazon ouvre le bal

Quand une multinationale américaine comme Amazon, championne de l’optimisation fiscale à l’égal des Apple, Google et autres McDonald, décide de montrer patte blanche aux services compétents des pays où elle travaille, la révolution semble en marche. Ce week-end, le géant de la vente en ligne a fait part de sa volonté d’être imposé dans chaque pays où il est représenté, au détriment du seul Luxembourg où il avait l’habitude de payer un impôt sur les sociétés extrêmement avantageux, comme l’a révélé le scandale LuxLeaks. Cette décision de renoncer aux rescrits fiscaux du Grand-Duché pourrait être historique si les autres sociétés décidaient d’emboîter le pas à Amazon.

À force de tirer sur la corde, le marchand a compris que son image était par trop ternie. Déjà bénéficiaire d’exonérations d’impôts et d’aides directes ou indirectes dans tous les territoires où elle s’installe, la société a décidé de changer son image, auprès des pouvoirs publics mais aussi de clients de moins en moins dupes de ces pratiques et de plus en plus attentifs au moment de passer commande sur internet. En jouant carte sur table, Amazon ne devient pas un modèle de vertu pour autant mais s’affranchit d’une réputation devenue trop sulfureuse.

Le Luxembourg va en pâtir et pourrait souffrir de ce vent de transparence si d’autres venaient à suivre Amazon. Les centaines de millions d’euros que rapportent les rescrits fiscaux pourraient ainsi fondre comme neige au soleil, mettant à mal une industrie organisée d’ingénierie fiscale qui emploie des milliers de personnes. Mais personne n’était réellement convaincu que cet âge d’or fiscal allait durer éternellement. L’ancien Premier ministre Jean-Claude Juncker l’avait présenté comme une nécessité pour le Luxembourg au sortir de décennies de domination de l’industrie métallurgique. Le vent tourne à nouveau. Le Grand-Duché a pris les devants en commençant la diversification de son économie. La course contre la montre a été lancée par la décision d’Amazon d’ouvrir le bal.

Christophe Chohin (cchohin@lequotidien.lu)