Hallucinant. C’est probablement le meilleur terme pour décrire la gestion du projet d’acquisition d’un satellite militaire par l’armée luxembourgeoise. Le 24 juillet 2018, la Chambre avait validé à une très large majorité (58 voix pour, 2 voix contre) une loi de financement de 170 millions d’euros. Rien n’indiquait à ce moment le dérapage financier qui occupe depuis plusieurs mois la commission de l’exécution budgétaire du Parlement.
La loi autorisait le gouvernement «à acquérir, lancer et exploiter un satellite et son segment sol destinés à l’observation de la Terre». Aujourd’hui, il est avéré que le budget initial n’était suffisant que pour l’acquisition et le lancement du satellite. Son exploitation et la mise en place des infrastructures au sol n’avaient été budgétisées ni dans la loi de financement ni dans le Fonds d’équipement militaire. «J’ai mentionné auprès de ma direction des oublis et signalé que le budget initial était déjà épuisé», indique Geoffroy Beaudot, officier en charge de la préparation du projet. Ses supérieurs, y compris l’ancien ministre de la Défense Étienne Schneider, semblent avoir fait la sourde oreille.
En mars de cette année, un surcoût de 180 millions d’euros a été annoncé. Mal à l’aise, le nouveau ministre de la Défense, François Bausch, a décidé d’informer la Chambre en toute transparence. En coulisses, on se renvoie la faute. Étienne Schneider charge François Bausch. Ce dernier se défend et fustige un projet mal ficelé. Le CSV, largement favorable au projet initial, accuse l’ancien ministre d’avoir caché des éléments.
La responsabilité politique reste à trancher. Elle sera à partager entre gouvernement et Chambre des députés. Des projets d’un tel ordre de grandeur nécessitent une plus grande attention. L’absence de considération accordée aux avis des hauts fonctionnaires, une confiance aveugle accordée par les députés de la majorité et un manque de hargne de la part des élus de l’opposition ont finalement mené à cet accident spatial.
David Marques