L’inflation est repartie à la hausse en mai dans la zone euro, un revers temporaire qui ne devrait pas menacer la baisse des taux de la Banque centrale européenne (BCE) attendue jeudi, mais pourrait entraver ses marges d’action ensuite.
L’inflation s’est accélérée plus que prévu à 2,6% sur un an, après 2,4% en mars et avril, dans les vingt pays partageant la monnaie unique, selon les chiffres publiés vendredi par Eurostat.
La hausse des prix à la consommation s’éloigne ainsi provisoirement de l’objectif de 2% fixé par l’institution monétaire. Les analystes interrogés par Factset et Bloomberg tablaient sur une accélération à seulement 2,5% en mai.
Autre mauvaise nouvelle, l’inflation sous-jacente –c’est-à-dire corrigée des prix volatils de l’énergie et de l’alimentation–, particulièrement scrutée par les marchés financiers et la BCE, est également repartie à la hausse à 2,9%, après 2,7% en avril.
Il semble malgré tout acquis que la BCE baissera une première fois ses taux lors de la réunion de son conseil des gouverneurs le 6 juin, selon les déclarations récentes de ses dirigeants. Pour la suite, l’assouplissement monétaire pourrait être moins rapide qu’attendu jusqu’ici.
La hausse des prix à la consommation en zone euro a été plus que divisée par quatre depuis le record de 10,6% sur un an atteint en octobre 2022, quand les tarifs de l’énergie flambaient dans le contexte de la guerre en Ukraine.
Pour endiguer l’inflation, la BCE a augmenté les coûts d’emprunt à un rythme sans précédent depuis juillet 2022. Ses taux sont maintenus inchangés à un niveau record depuis octobre 2023, au prix d’une croissance économique en berne.
La remontée des prix en mai « est liée à des facteurs temporaires et ne signifie pas que le processus désinflationniste a été stoppé », a commenté Riccardo Marcelli Fabiani pour Oxford Economics.
« Débat animé » sur la politique monétaire
Cette hausse « n’empêchera pas la baisse des taux d’intérêt en juin, clairement annoncée. Mais la BCE sera prudente et il est peu probable qu’elle abaisse (à nouveau) ses taux d’intérêt lors de la réunion de juillet », a-t-il estimé.
Les chiffres décevants du mois de mai devraient donner des arguments aux responsables de la BCE qui plaident pour l’attentisme au-delà de juin.
Ils étaient déjà confortés par la croissance économique plus forte qu’attendu au premier trimestre en zone euro, à +0,3% par rapport aux trois derniers mois de l’année dernière, et les craintes alimentées par les hausses de salaires.
« Alors que la BCE semble prête à abaisser ses taux la semaine prochaine, le débat sera animé sur sa capacité à desserrer les freins de l’économie pendant le reste de l’année », a commenté Bert Colijn de la banque ING.
Selon lui, la dernière publication d’Eurostat « illustre le fait que les dernières étapes du retour de l’inflation à l’objectif de 2% ne sont pas nécessairement faciles ».
La remontée de l’inflation s’explique par l’accélération des prix des services et de l’énergie.
Dans les services, les tarifs ont progressé de 4,1% sur un an en mai, contre 3,7% en avril. Les prix de l’énergie qui avaient reculé en avril de 0,6%, ont augmenté de 0,3% en mai.
En revanche, l’inflation s’est ralentie dans les produits alimentaires, à 2,6% (-0,2 point par rapport à avril) et dans les biens industriels (à 0,8%, -0,1 point), a précisé l’institut européen des statistiques.
Au sein de la zone euro, la plus forte progression des prix en mai a été enregistrée en Belgique (4,9%), où les salaires sont indexés sur l’inflation, devant la Croatie 4,3%.
L’inflation a atteint 2,7% en France et 2,8% en Allemagne, tandis que la Lettonie (0,2%) et la Finlande (0,5%) ont affiché les chiffres les plus bas, selon les données harmonisées d’Eurostat.