Le géant mondial de l’automobile Volkswagen a fait face mercredi, pour la deuxième année depuis l’éclatement du scandale des moteurs diesel truqués, à ses actionnaires, désormais rassurés sur la santé financière du constructeur mais toujours revendicatifs.
Lors de la précédente assemblée générale ordinaire, le groupe aux douze marques, propriétaire entre autres de Seat, Audi, Porsche et Skoda, avait essuyé un feu nourri de critiques de la part de petits actionnaires, ulcérés par l’installation d’un logiciel truqueur sur 11 millions de véhicules diesel pour les faire paraître moins polluants.
Plus d’un an et demi après les révélations qui ont plongé le mastodonte dans une crise sans précédents, le ton s’est adouci parmi les quelque 3.000 actionnaires réunis au centre des expositions de Hanovre (nord). En 2016, le groupe a connu « un succès remarquable, malgré tout », a estimé son patron, Matthias Müller.
Redressement
Volkswagen a dégagé l’an passé un bénéfice net de 5,1 milliards d’euros, après une perte historique en 2015 due à la tricherie sur le diesel, et cela en dépit de nouvelles provisions pour se couvrir des coûts liés de multiples poursuites judiciaires dans le monde. Ces provisions se montent au total à 22,6 milliards d’euros. Signe que la confiance des clients a été en partie restaurée, le groupe a signé des ventes records en livrant 10,3 millions de véhicules, ce qui a lui a permis d’arracher à Toyota, pour la première fois, le titre de champion mondial de l’automobile.
Pas assez rentable, la marque Volkswagen, plongée dans une restructuration prévoyant la suppression -sans licenciements secs- de jusqu’à 30.000 postes, a par ailleurs amorcé un redressement en début d’année. Amélioration saluée par les actionnaires, le dividende, réduit à peau de chagrin l’année précédente, doit remonter à 2,06 euros par action de préférence pour 2016.
De quoi œuvrer à une assemblée générale « plus calme que l’an dernier », anticipait en arrivant Wolfgang Dick, un actionnaire quinquagénaire venu d’Hildesheim, près d’Hanovre. « Il va sans doute y avoir un peu d’animosité parce que Volkswagen n’est pas assez ouvert et sincère, mais l’ambiance est nettement meilleure que l’an dernier », estime aussi Heinrich Krüger, 71 ans, un habitant de Brunswick (nord), qui a hérité ses actions Volkswagen de son père.
Dan Müller, 21 ans, vit lui sa première assemblée générale chez Volkswagen. Il a acquis des actions au moment de l’effondrement du cours, à l’automne 2015, profitant de la bonne affaire. Le titre a repris des couleurs depuis, même s’il reste inférieur de 14% environ à avant le scandale. « C’était un risque mais ça a été payant et je suis convaincu que le cours de l’action va encore remonter », dit-il, en évoquant l’offensive du groupe dans les 4×4 citadins et l’électrique.
Volkswagen entend en effet consacrer 9 milliards d’euros au développement de véhicules électriques et hybrides dans les cinq prochaines années afin de se hisser au rang de numéro un dans ce domaine d’ici 2025.
Pas assez loin
Le groupe a néanmoins été étrillé par plusieurs représentants de petits actionnaires sur le plafonnement de la rémunération de ses dirigeants, encore insuffisant à leur goût, et sur les responsabilités dans le scandale du diesel. « Qui savait quoi et quand? Nous n’avons toujours pas de réponse », a critiqué Ulrich Hocker, président de l’association de petits porteurs DSW. Hans Dieter Pötsch, directeur financier lors du dieselgate devenu président du conseil de surveillance, a comme l’an dernier été accusé de ne pas vouloir tirer au clair cette affaire.
Avançant des raisons juridiques, le responsable a confirmé qu’aucun rapport du cabinet Jones Day, recruté en interne pour enquêter, ne serait publié. Le constructeur, qui mène une grande opération de mise aux normes des véhicules équipés du logiciel incriminé, a plaidé coupable aux Etats-Unis, où il va dédommager financièrement autorités, concessionnaires et clients.
Mais la justice, notamment allemande, cherche toujours à établir les responsabilités individuelles et plusieurs plaintes menacent toujours le groupe. Divers groupements d’actionnaires comptent désavouer le directoire et le conseil de surveillance en refusant d’approuver la gestion sur l’année passée. Un acte seulement symbolique puisque les grands actionnaires (familles héritières, Etat régional de Basse-Saxe, Emirat du Qatar) soutiennent la direction.
Le Quotidien / AFP