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Volkswagen commence à lever le voile sur les raisons du «dieselgate»


Logo Volkswagen le 3 février 2016. (Photo : AFP)

Volkswagen a commencé à lever le voile sur les raisons de la manipulation de ses moteurs diesel et à répondre à la question « qui savait quoi et quand ? »: l’ex-patron, Martin Winterkorn, disposait d’éléments dès mi-2014.

Dans un communiqué détaillé, le géant allemand de l’automobile a reconnu mercredi soir que le point de départ de ce qu’il appelle pudiquement «la thématique du diesel» remontait à 2005 et «la décision stratégique de Volkswagen de lancer une grosse offensive dans le diesel aux États-Unis».

Mais «les normes américaines d’émissions de gaz polluants sont sévères», explique Volkswagen, ce qui a placé les ingénieurs et techniciens chargés du développement d’un nouveau moteur diesel devant «des défis». Le respect des normes sur les oxydes d’azote (NOx) était difficilement compatible avec l’abaissement recherché des niveaux d’émission de dioxyde de carbone (CO2). «Un groupe de personnes dans l’activité développement, dont l’identité est encore en train d’être établie, a alors décidé de modifier le logiciel de pilotage du moteur», poursuit Volkswagen.

C’est de cette décision fatale que découle l’affaire Volkswagen, ou «dieselgate»: démasqué par les autorités américaines, le colosse aux 12 marques a avoué en septembre avoir équipé 11 millions de voitures dans le monde de moteurs diesel truqués, capables de détecter les phases de test pour, pendant celles-ci, respecter les normes d’émission de NOx, qu’ils dépassent allègrement le reste du temps.

Un «mémo» dès mai 2014

Volkswagen doit désormais remettre aux normes tous les véhicules concernés – une opération déjà lancée en Europe. La direction du groupe a été profondément remaniée, son image est sévèrement endommagée, les plaintes et poursuites pleuvent et le dommage financier est encore difficile à cerner. La question «qui savait quoi et quand?» est un des aspects centraux du scandale, particulièrement le rôle de Martin Winterkorn, qui a rendu son tablier tout de suite après l’aveu, et celui des autres membres de la direction.

Volkswagen a confirmé ce que certains organes de presse ont déjà rapporté: dès mai 2014, le patron avait été mis au courant, par «un mémo», d’irrégularités sur les émissions du moteur EA189, relevées par l’autorité californienne de l’environnement Carb. «Il n’est pas établi si et dans quelle mesure Martin Winterkorn a pris connaissance de ce mémo», précise Volkswagen. Un second «mémo» lui a été adressé en novembre de la même année.

«De ce que l’on sait à l’heure actuelle, le sujet, qui n’était qu’un sujet parmi d’autres concernant les produits, n’a pas retenu outre mesure l’attention du directoire», explique le groupe, qui mène une enquête interne approfondie avec l’aide d’un cabinet d’avocats américain.

Ce n’est qu’à l’été 2015, après plusieurs étapes intermédiaires de tests et négociations avec le Carb, que Martin Winterkorn a demandé des éclaircissements, et seulement fin août que le directoire en est arrivé à la conclusion qu’un logiciel truqueur était à l’œuvre.

«Surréaliste»

Volkswagen livre ce récit pour se laver du soupçon d’avoir communiqué trop tard sur le sujet, notamment à l’intention des marchés financiers, expliquant que la direction «a rempli ses obligations» à cet égard. Outre les clients floués et les pouvoirs publics trompés dans plusieurs pays, le groupe est aussi confronté à la colère des actionnaires, qui ont vu le titre s’écrouler de 40% en quelques jours en septembre. «On peut se dire que ce qui nous est arrivé est relativement surréaliste et inutile», commentait dans un entretien au quotidien Le Monde mercredi le nouveau patron de Volkswagen, Matthias Müller. Il fait la tournée des médias pour afficher la contrition du groupe, mais aussi rassurer sur sa solidité, un message adressé aussi au Salon automobile de Genève.

Les salariés de la marque Volkswagen en tout cas ont eu une bonne nouvelle jeudi: contrairement aux attentes, ils percevront un bonus pour 2015, a annoncé dans le journal interne le président du comité d’entreprise. Et ce alors qu’une perte salée s’annonce pour la maison mère. Volkswagen n’a toujours pas communiqué de date de publication de ses résultats 2015. La filiale haut de gamme Audi en revanche a dévoilé ses chiffres jeudi: entre autres à cause du «dieselgate», son bénéfice net a reculé de 3% l’an dernier.

Le Quotidien