Avec 3,2 millions de bouteilles vendues malgré le covid, les ventes de crémant de Luxembourg se sont envolées ! C’est ce que nous apprend le directeur de l’Institut viti-vinicole Roby Ley.
Le bilan de 2021
Roby Ley : La météo de l’an passé a été fluctuante : il y a eu des hauts et des bas. Elle a été défavorable au printemps, lors du débourrement (NDLR : le moment où les bourgeons s’ouvrent), mais tout le retard a été récupéré par un temps merveilleux lors de la floraison. Les vendanges ont débuté le 27 septembre, ce qui est tard par rapport aux dernières années, mais assez normal. Globalement, 2021 a demandé beaucoup de travail aux vignerons mais, finalement, ils ont été récompensés de leurs efforts.
Avec une moyenne de 99 000 hectolitres de vins produits par an, les rendements de 2021 sont bons avec 98 000 hectolitres. La quantité est satisfaisante, la qualité aussi. Les vins auront un caractère plus luxembourgeois qu’en 2018, par exemple, où le fruité était parfois masqué par un fort degré d’alcool. En 2021, les raisins n’ont pas atteint une telle maturité mais les valeurs obtenues permettront de réaliser de très beaux vins.
Une leçon à retirer de la crise
Malgré la pandémie, nous pouvons nous réjouir de voir que les amateurs de vins luxembourgeois sont restés fidèles à leurs habitudes! Nous évaluons les effets du marché selon le calendrier de la vigne, les périodes courent donc du 1er septembre au 31 août.
Concernant les vins tranquilles (NDLR : sans bulles), il faut retenir que la consommation est passée de 8,5 à 9 litres de vin luxembourgeois bus par habitant sur les 12 mois, alors que la consommation totale de vin a légèrement baissé (de 41 à 40 litres par habitant dans le même laps de temps).
La position des vins luxembourgeois s’est donc renforcée, ce qui entre en corrélation avec la constatation d’une petite baisse des importations de vins étrangers. Compte tenu du contexte, ce constat positif est tout à fait remarquable.
Les grandes fêtes n’ont toujours pas repris, les grandes réceptions (NDLR : et donc les grandes commandes aux traiteurs) non plus… alors se stabiliser – et même progresser – dans ce climat qui reste incertain est une très bonne nouvelle !
La reprise des ventes de crémants a été plus spectaculaire encore ! La période du 1er septembre 2019 au 31 août 2020 avait été très difficile avec seulement 2 millions de bouteilles vendues alors que depuis 2018, le marché s’était stabilisé à 3 millions de cols.
Le premier confinement avec la fermeture des bars et des restaurations, l’annulation des fêtes de village et des fêtes familiales a impacté le crémant plus que tous les autres vins. Les bulles illustrent la convivialité et le plaisir d’être ensemble, des moments que nous ne vivions plus alors.
L’année du 30e anniversaire de l’appellation Crémant de Luxembourg
Il faut avant tout miser sur la qualité
Mais la période suivante (NDLR : du 1er septembre 2020 au 31 août 2021) a vu une très forte hausse des ventes, puisque 3,2 millions de bouteilles ont été bues alors que le covid était toujours présent. C’est un nouveau record ! Qui plus est, atteindre cette nouvelle marque l’année du 30e anniversaire de l’appellation Crémant de Luxembourg est un très beau symbole.
Bien sûr, cela ne permet pas encore aux vignerons de rattraper le manque à gagner de 2020, mais ce rebond démontre toute la confiance que les consommateurs placent dans le crémant. Ils le connaissent, l’apprécient : quel beau succès en l’espace de seulement trois décennies !
Si ces chiffres sont positifs, c’est aussi parce que les vignerons ont su réagir et mettre en place de nouvelles méthodes de distribution. La crise a provoqué un essor de la digitalisation, beaucoup de domaines possèdent désormais une boutique en ligne ou vendent leurs vins sur la plateforme Letzshop, qui fonctionne bien.
Car en l’absence des fêtes et les restrictions imposées à la restauration, si les ventes ont progressé, c’est essentiellement grâce à la consommation domestique.
Une opportunité à saisir en 2021
Il est désormais très clair qu’il ne sert à rien de produire davantage puisque le marché se situe autour de 90 000 hectolitres par an (NDLR : 98 000 hectolitres ont été produits en 2021). Nous le disons depuis une douzaine d’années, il faut avant tout miser sur la qualité, car les consommateurs boivent moins, mais mieux.
Les lois récentes qui visent à produire tout en respectant l’environnement (NDLR : le Luxembourg est le premier pays européen à avoir banni complètement le glyphosate, par exemple) vont dans ce sens.
Les vins de 2021 auront un caractère plus luxembourgeois
Cela ne veut toutefois pas dire qu’il faille arracher tous les rivaners et les elblings (NDLR : deux cépages traditionnellement d’entrée de gamme). En 2012, ils représentaient la moitié de l’encépagement et aujourd’hui, moins d’un quart. Mais bien faits, ces vins peuvent être très intéressants. Un bon rivaner ou un bon elbling vaut mieux qu’un mauvais riesling ou un mauvais pinot gris !
Sans compter que ce ne sont pas des cépages internationaux que l’on retrouve partout. Ils sont très ancrés localement et font partie de l’identité de la Moselle luxembourgeoise.
Ce que j’aimerais, c’est retrouver ces bons rivaners et ces bons elblings dans les restaurants, notamment servis au verre, plutôt que des vins génériques étrangers si bons soient-ils. Bien sûr, les marges seront moins importantes parce que produire au Luxembourg sera toujours plus cher qu’ailleurs, mais les consommateurs ne cessent de montrer qu’ils sont très attachés à tout ce qui est produit localement…
À la vôtre!
Normalement, à pareille époque, les pots de nouvel an se succèdent sur la Moselle. Cette année encore, il faudra s’en passer. Mais puisque, finalement, on y apprenait souvent quelque chose, Le Quotidien a décidé d’organiser – comme l’an passé – une série de pots virtuels.
Ils sont moins conviviaux, certes, mais tout aussi instructifs !
De notre collaborateur, Erwan Nonet