Selon le rapport World Wealth Report2020 de Capgemini, 6,42 % de la population dispose de plus d’un million d’euros d’actifs investissables.
Dans le monde de la finance, un millionnaire n’est pas juste une personne avec de l’argent. C’est une «personne à valeur nette élevée», en abrégé un «HNWI» pour «High net worth individual» en anglais. Ce terme désigne une personne avec des actifs investissables d’au moins un million de dollars et dont est exclue sa résidence principale. Juste en dessous d’un HNWI, on trouve les «nantis de masse», c’est-à-dire les personnes ayant entre 100 000 dollars et 1 million de dollars d’actifs investissables. Dans le sens inverse, les personnes avec des actifs investissables entre 1 et 5 millions de dollars sont nommées les «millionnaires du pas de la porte» et à plus de 30 millions de dollars, on parle d’«ultra-HNWI».
Selon le World Wealth Report 2020 de Capgemini qui porte sur la croissance de la richesse des particuliers fortunés, il y a un peu plus de 40 200 millionnaires résidant au Luxembourg. «Pour un petit pays comme le Luxembourg, le nombre est tout de même important. Pour comparer, en Belgique, sur une population de 11 millions d’habitants, nous avons environ 130 000 millionnaires», souligne Robert van der Eijk, Executive vice-président et directeur de Capgemini Invent, de passage au Luxembourg.
Selon les quelques données sur le Grand-Duché en sa possession, le nombre de millionnaires est resté stable au Luxembourg avec une croissance de la population des HNWI de 0,4 % entre 2018 et 2019. «Là encore, si l’on devait comparer avec la Belgique qui est un marché très différent, entre 2012 et 2019, la population des HNWI a progressé de 63 %. Une progression qui s’explique par diverses raisons, dont une meilleure planification des successions», assure Robert van der Eijk. À noter qu’en Belgique, un HNWI possède en moyenne 2,5 millions de dollars d’actifs investissables. «Malheureusement, je n’ai pas la donnée pour le Luxembourg», regrette Robert van der Eijk. Au niveau du secteur de la gestion de fortune au Luxembourg, Capgemini mentionne qu’il est en croissance de 0,6 %, notamment grâce aux prix de l’immobilier en hausse de 14 % en 2019.
L’immobilier constitue d’ailleurs une bonne partie de la structure de la richesse des HNWI. «Au Luxembourg et en Europe, la structure du portefeuille est résolument la même. Le capital investi représente 24,5 % et le cash 27,5 %. On peut effectivement remarquer que par rapport à ce qui se fait en Amérique du Nord, l’immobilier, avec 16,5 %, et les investissements alternatifs, avec 15,3 %, sont très présents en Europe», analyse Robert van der Eijk.
Plus de millionnaires en Europe qu’en Asie
Au niveau mondial, Capgemini révèle dans son rapport que la richesse et le nombre de particuliers fortunés ont augmenté de près de 9 % dans le monde en 2019, malgré le ralentissement de l’économie mondiale, les guerres commerciales internationales et les tensions géopolitiques.
Petite nouveauté, l’Amérique du Nord et l’Europe ont pris l’avantage et ont dépassé pour la première fois depuis 2012 l’Asie-Pacifique. En Amérique du Nord, le nombre et la richesse des particuliers fortunés ont progressé de 11 % (alors qu’en 2018, la richesse avait diminué de 1 %). La région contribue pour 39 % à la hausse de la population mondiale des particuliers fortunés et pour 37 % à la croissance de la richesse en 2019. L’Europe arrive juste derrière avec une augmentation du nombre et de la richesse des particuliers fortunés de près de 9 % et devance ainsi l’Asie-Pacifique et l’Amérique latine.
«J’avais l’habitude de dire que pour être millionnaire, il fallait se rendre en Asie, on voit que cela change», souligne Robert van der Eijk. Ce dernier met également l’accent sur les changements de comportement des HNWI. «On voit qu’il y a une tendance du financement du développement durable de la part des particuliers fortunés et d’ailleurs, aujourd’hui, 80 % des sociétés de gestion de patrimoine savent répondre à cette demande. On voit aussi un changement radical du client dans la gestion de fortune. Les jeunes sont beaucoup plus exigeants et ils veulent de nouveaux services. Ils veulent payer pour ces services et cela doit être nickel. Tandis que la génération vieillissante souhaite payer moins avec un résultat satisfaisant. On voit aussi une forte concurrence des Big Tech sur le marché des services financiers, obligeant les gestionnaires de patrimoine à renforcer rapidement leurs capacités en la matière», termine Robert van der Eijk.
Covid-19 : entre opportunité et perte
Selon la World Federation of Exchanges, la pandémie Covid-19 a fait disparaître plus de 18 000 milliards de dollars sur les marchés mondiaux au cours des mois de février et mars 2020, avant une légère reprise en avril.
En conséquence, la richesse mondiale devrait diminuer de 6 % à 8 % jusqu’à fin avril 2020 (par rapport à décembre 2019), comme le détaille Capgemini dans son nouveau rapport. Parallèlement, les priorités d’investissement évoluent : dans le contexte actuel de pandémie, les investissements durables qui soutiennent des causes environnementales et sociétales prennent une importance croissante. «Face à l’ampleur exceptionnelle de l’incertitude que nous connaissons aujourd’hui, les sociétés de gestion de patrimoine se retrouvent en terrain inconnu», indique Anirban Bose, directeur général des services financiers de Capgemini et membre du comité de direction générale du groupe. «Mais cette imprévisibilité pourrait être synonyme d’opportunités pour les gestionnaires, en devenant plutôt une occasion de réévaluer et de réinventer leurs modèles économiques et opérationnels afin de gagner en agilité et en résilience.»
Pour Robert van der Eijk, «on voit qu’il y a un décalage entre ce qui se passe sur les marchés et dans la réalité. Les bourses se sont très vite reprises alors que l’économie et la croissance sont toujours en baisse.»
Jeremy Zabatta