Le scandale des moteurs diesel du groupe Volkswagen a pris une ampleur inédite mardi, le constructeur allemand admettant que 11 millions de ses véhicules dans le monde étaient équipés du logiciel de trucage aux tests antipollution découvert aux Etats-Unis.
« Des enquêtes internes ont montré que le logiciel en question était aussi présent dans d’autres véhicules diesel du groupe », selon un communiqué de Volkswagen, maison-mère des marques VW mais aussi Audi, Skoda, Seat ou encore Porsche. Le trucage, qui visait à contourner les tests antipollution, concerne tous les moteurs diesel de type EA189, soit « un volume total d’environ 11 millions de véhicules dans le monde » pour lesquels « une différence frappante entre les valeurs lors du contrôle et lors du fonctionnement réel du véhicule a été constatée », selon ce communiqué.
Pour le moment la tricherie était avérée seulement aux Etats-Unis, depuis les révélations vendredi des autorités américaines. L’Allemagne a depuis ordonné des tests, de même que la Corée du Sud. L’Italie a annoncé l’ouverture d’investigations tandis que la France réclame « une enquête européenne ». La Commission européenne a de son côté jugé « prématurées » des « mesures de surveillance immédiates » en Europe.
Volkswagen a pris les devants en fournissant de lui-même une idée de l’ampleur de la supercherie. Le groupe « travaille avec acharnement à éliminer ces anomalies » au moyen de « mesures techniques », précise son communiqué. Les modèles diesel incriminés sont équipés d’un logiciel qui détectait le moment où étaient conduits les tests aux émissions polluantes, et en faussaient le résultat.
Volkswagen, qui pourrait devoir payer jusqu’à 18 milliards de dollars (16 milliards d’euros) d’amende rien qu’aux Etats-Unis, sans compter le coût des rappels et d’éventuelles procédures en justice, va mettre de côté 6,5 milliards d’euros sous forme de provisions dans ses comptes du troisième trimestre (juillet-septembre). De quoi sérieusement amputer le bénéfice annuel du géant de l’automobile, aux 200 milliards d’euros de chiffre d’affaires (2014) et 600 000 salariés dans le monde.
Cet avertissement sur résultats a fait replonger l’action de plus de 20% en Bourse à Francfort, au lendemain d’une débâcle qui avait fait s’évaporer plus de 15 milliards d’euros de capitalisation boursière. A 12h32, le titre dégringolait de 19,33% à 106,65 euros. A Francfort mais aussi à Paris, les autres valeurs automobiles dévissaient aussi, l’affaire jetant l’opprobre sur le secteur tout entier.
Selon le journal allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung, Volkswagen avait été alerté dès mai 2014 des griefs qui lui étaient adressés, et avait même rappelé en décembre dernier de son plein gré un certain nombre de véhicules.
Fleuron de l’industrie allemande aux liens étroits avec la politique – un Etat régional allemand est actionnaire à son capital -, le groupe a vendu 5 millions de voitures dans le monde au premier semestre, supplantant le japonais Toyota comme numéro un mondial.
Selon la presse allemande, les membres les plus influents de son conseil de surveillance se réunissent mercredi à Wolfsburg (nord), siège de la société, et le patron Martin Winterkorn doit venir s’expliquer. Son avenir paraît de plus en plus incertain. Sollicité, le groupe n’a répondu à aucun appel. Théoriquement, l’organe de contrôle devait prolonger jusqu’à fin 2018 son mandat lors d’une réunion vendredi. Volkswagen est muet sur la tenue de celle-ci comme sur tout le reste.
Olaf Lies, ministre de l’Economie du Land actionnaire de Basse-Saxe et membre du conseil de surveillance, a prévenu mardi que « bien sûr » des têtes allaient tomber dans cette affaire. « Il va s’agir d’établir qui savait quoi, qui a pris les décisions », a-t-il dit. M. Lies a aussi appelé à ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain, rappelant que le groupe fabriquait « d’excellents produits ».
D’aucuns s’inquiétaient déjà en Allemagne du préjudice causé à la réputation des produits industriels allemands dans leur ensemble. « C’est un énorme coup porté à l’industrie allemande », déplorait ainsi le député bavarois conservateur Max Straubinger. La première économie européenne est très fière de son industrie, pilier de son économie.
AFP / S.A.