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Tesla promet la voiture autonome pour demain, mais la route est encore longue


Elon Musk promet "cette année" un véhicule 100% autonome. (Photo : DR)

Le fantasque Elon Musk, patron de Tesla, a beau promettre un véhicule 100% autonome pour cette année, le chemin est encore long avant de pouvoir lire son journal au volant sans regarder la route.

La voiture qui se déplace seule, vient chercher ses passagers et les emmène à destination, tout en leur permettant de dormir ou de lire, serait donc pour 2020 ? Elon Musk s’est dit jeudi « extrêmement confiant qu’on aura très rapidement les fonctionnalités de base d’une conduite autonome de niveau 5, qui est en gros l’autonomie complète (…) cette année », dans un message vidéo à l’ouverture de la Conférence mondiale sur l’intelligence artificielle (WAIC) à Shanghai.

Mais ce n’est pas la première fois que le patron de Tesla fait de telles annonces. Il avait déjà promis la voiture autonome pour 2018, puis avait assuré qu’il ferait circuler des robots-taxis début 2020. Les experts semblent désormais un peu échaudés et mettent en garde concernant les barrières règlementaires qui restent à lever avant de voir des voitures circuler sans chauffeur.

« Nous sommes encore loin d’un véritable système de niveau 4, donc dire que nous sommes ‘très proches du niveau 5’ semble sorti de nulle part », estime Paul Lewis, responsable de recherche au Eno Center for Transportation, un organisme à but non lucratif. La « formidable excitation » qui entourait il y a quelques années l’autonomie totale est retombée et « les développeurs de technologies commencent à réaliser les limites de l’intelligence artificielle et les avantages du cerveau humain dans la gestion de certaines de ces tâches », souligne-t-il.

L’annonce d’Elon Musk : « Une technique de Tesla pour tirer plus de revenus » ?

Raj Rajkumar, professeur d’ingénierie à l’université Carnegie Mellon et codirecteur du laboratoire de recherche en technologie automobile de l’école, est également très sceptique. Pour lui, la récente annonce d’Elon Musk « pourrait être juste une autre technique de Tesla pour tirer plus de revenus » de son système semi-autonome. Le fabricant californien de voitures électriques est depuis peu l’entreprise du secteur automobile la plus chère en Bourse, sa valeur boursière a dépassé les 260 milliards de dollars à Wall Street même si ses ventes sont bien inférieures à celles de ses concurrents traditionnels.

Tesla, Google et les constructeurs automobiles sont engagés dans une course effrénée à la technologie autonome. Google a une longueur d’avance puisque son ancienne division automobile, désormais connue sous le nom de Waymo, fonctionne au niveau 4 d’autonomie, sans chauffeur. Mais les restrictions sont géographiques, avec une circulation limitée à l’Arizona dans le cadre d’un programme de tests. C’est ce niveau, qui comprend un périmètre géographique délimité, que les fabricants cherchent déjà à maîtriser, souligne Ed Niedermeyer, responsable de la communication de Partners for Automated Vehicle Education qui regroupe des associations et entreprises automobiles technologiques (mais pas Tesla). Le niveau 5 signifie qu’un véhicule pourrait gérer n’importe quelle situation, n’importe quelle météo, n’importe quel terrain, sans aucune assistance humaine, ce qui est un défi de taille, selon lui. Des analystes pointent du doigt le danger de telles annonces, qui pourraient pousser certains automobilistes à surestimer le niveau d’autonomie de leur voiture.

Tesla a déjà été critiqué car des conducteurs ont utilisé son « pilote automatique », provoquant des accidents. Or, relève Paul Lewis, le pilote automatique de Tesla correspond à une autonomie de niveau 2, qui demande au conducteur de rester attentif. Pour Ed Niedermeyer, il est important d’éduquer le public sur les différences entre l’autonomie et les « systèmes d’aide à la conduite » qui prennent en charge certaines fonctions mais nécessitent un conducteur. Mais l’obstacle majeur à l’autonomie complète des voitures reste l’acceptation de la part du grand public, commente Susan Shaheen, codirectrice du Transportation Sustainability Research Center de l’université de Californie à Berkeley. Elle cite notamment les risques pour la sécurité, la cybersécurité ou concernant la violation de données.

LQ/AFP