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Tata Steel cherche repreneurs, tensions au Royaume-Uni


photo AFP

Les discussions s’intensifiaient lundi pour trouver des repreneurs aux activités de Tata Steel au Royaume-Uni, tandis que les syndicats maintenaient la pression sur un gouvernement accusé d’avoir fermé les yeux sur cette crise historique de la sidérurgie britannique.

Le Royaume-Uni restait sous le choc, cinq jours après l’annonce par le géant indien qu’il envisageait de vendre ses activités britanniques, qui emploient environ 15.000 personnes. L’ensemble de la filière et sa cinquantaine de milliers de salariés est depuis plongé dans une crise ouverte. Des médias mettaient en avant l’approfondissement de négociations entre des repreneurs potentiels et Tata Steel, le tout sous l’égide du gouvernement conservateur de David Cameron, qui cherche à redorer son blason dans cette affaire.

Un magnat indien du secteur, Sanjeev Gupta, devait arriver lundi soir au Royaume-Uni. Selon la BBC, il a déjà entamé des discussions préliminaires avec les autorités pour la reprise d’une partie des activités, y compris du site symbole de Port Talbot au Pays de Galles. M. Gupta a déclaré à la BBC qu’il avait eu des discussions « très encourageantes » avec le gouvernement britannique et assuré qu’il ne voulait « pas supprimer massivement des emplois », évoquant seulement de possibles requalifications.

L’entreprise de M. Gupta, Liberty House, spécialisée dans les activités « aval » de la sidérurgie comme la transformation et la distribution, a récemment repris deux petites usines de Tata Steel en Ecosse. Le quotidien The Guardian assurait pour sa part qu’une firme d’investissement, Greybull Capital, était sur le point de boucler la reprise des activités de « produits longs » de Tata Steel à Scunthorpe, une vaste usine du Lincolnshire (est de l’Angleterre). Dans ce cadre, elle pourrait redonner vie à la marque British Steel, la société nationale de la sidérurgie britannique privatisée à la fin des années 1980 sous Margaret Thatcher.

Barrières tarifaires européennes

En première ligne avec Port Talbot (4.000 emplois directs), le Pays de Galles a convoqué en urgence son assemblée, où s’est exprimé le Premier ministre du gouvernement régional, le travailliste Carwyn Jones. « Si un acheteur ne peut pas être trouvé pendant la période de mise en vente, le gouvernement du Royaume-Uni doit nationaliser l’usine jusqu’à ce qu’un repreneur soit trouvé », a-t-il déclaré, indiquant que le gouvernement régional gallois était prêt à contribuer financièrement. Il avait aussi reproché auparavant au gouvernement central de Londres de s’être opposé aux efforts de l’Union européenne (UE) pour élever ses barrières tarifaires afin de protéger son acier, particulièrement face aux importations chinoises.

« L’Europe pourrait le faire, mais le gouvernement britannique les en a empêchés », a-t-il lancé, reprenant des accusations lancées vendredi, notamment par le lobby européen de l’acier, selon lesquelles Londres aurait laissé sa sidérurgie s’enfoncer dans la crise pour maintenir de bonnes relations avec Pékin. Le bouillant maire de Londres, Boris Johnson, qui fait campagne pour un départ du Royaume-Uni de l’UE à l’occasion du référendum du 23 juin, a lui-même convenu du fait que « le Royaume-Uni a été un des pays qui ont fait du lobbying contre des taxes » européennes face au dumping.

Dans ce contexte, le gouvernement conservateur promet de faire le maximum pour permettre à l’activité de perdurer, laissant miroiter une incitation financière à d’éventuels repreneurs, tout en se disant peu favorable à une nationalisation. « Tata va bientôt publier une offre (…). Nous allons aussi offrir un soutien pour conclure (un accord avec) l’acheteur et donner à cette usine sidérurgique un futur viable et de long terme », a expliqué dimanche le ministre aux Entreprises, Sajid Javid, lui-même mis en cause pour s’être absenté en Australie au moment où Tata Steel décidait, à Bombay, d’un pan de l’avenir sidérurgique britannique.

Les syndicats du secteur ont pour leur part réuni leurs représentants de tout le pays lundi dans la capitale afin d’intensifier la pression sur les décideurs. « Le gouvernement doit rassurer les clients (des producteurs d’acier), il doit dire clairement à Tata que l’intégrité de l’entreprise doit être maintenue et enfin le gouvernement doit investir dans notre industrie sidérurgique pour lui donner un avenir », a déclaré Roy Rickhuss, secrétaire général du syndicat Community, à l’issue de la réunion.

Le Parti travailliste a aussi appelé à une réunion en urgence de la Chambre des communes, actuellement en pause pascale, mais le pouvoir l’a refusée.