Shell a subi une lourde perte de plus de 7 milliards de dollars au troisième trimestre, payant le prix fort pour l’abandon de projets en Alaska et au Canada, sur fond de cours du pétrole toujours déprimés.
Le géant pétrolier anglo-néerlandais a annoncé jeudi avoir subi une perte nette de 7,41 milliards de dollars au troisième trimestre contre un bénéfice de 4,46 milliards un an plus tôt. Il a notamment pris une charge massive de 8,2 milliards de dollars dans l’amont, l’activité reine d’exploration-production.
Sur ce total, 2,6 milliards viennent de l’arrêt annoncé fin septembre de ses forages controversés au large de l’Alaska, après une première série d’explorations jugée décevante. Shell vient aussi d’annoncer mardi qu’il renonçait à exploiter un gisement de sables bitumineux à Carmon Creek au Canada, une annonce qui se traduit par une charge supplémentaire d’un peu plus de 2 milliards de dollars.
Enfin, le groupe a pris une charge pour dépréciation de 3,7 milliards de dollars (dont 2,3 milliards concernant le gaz de schiste aux États-Unis) liée à la révision à la baisse des perspectives des cours du pétrole et du gaz à long terme. Face à la faiblesse persistante des cours du pétrole depuis plus d’un an, les majors réagissent en réduisant la voilure, renonçant à des investissements risqués ou peu rentables ou encore en vendant des actifs.
«Nous avons arrêté les activités d’exploration au large de l’Alaska et stoppé la construction du projet de Carmon Creek au Canada. Ce sont des décisions difficiles mais qui auront un impact», a déclaré le directeur général, Ben van Beurden.
«Je suis déterminé à faire de Shell une entreprise plus concentrée et compétitive», a-t-il souligné.
L’intégration de BG sur les rails
Même en dehors des charges exceptionnelles qui ont plombé les résultats, la performance opérationnelle de Shell a beaucoup souffert pendant le trimestre.
Le bénéfice ajusté – hors évolution de la valeur des stocks et exceptionnels – a chuté de 70% à 1,77 milliard de dollars, un montant final bien inférieur aux attentes des analystes, avec notamment une perte inhabituelle de 425 millions dans l’amont.
Les bénéfices ont en revanche bondi dans l’activité aval, qui a profité de l’amélioration des marges dans le raffinage. Après ces mauvais résultats, la réaction restait mesurée à la Bourse de Londres, où l’action «A» Royal Dutch Shell perdait 1,93% à 1.704,5 pence, dans un marché en repli de 0,92%.
«Même si ces annonces devraient avoir un impact négatif sur les actions dans un premier temps, nous pensons toujours que la direction prend l’initiative pour remettre l’entreprise en ordre face à la faiblesse des cours du pétrole», ont commenté les analystes de Barclays.
Dans ce contexte difficile, Shell compte toujours sur l’acquisition de son rival BG pour 47 milliards de livres (65 milliards d’euros) afin de se renforcer dans les activités les plus rentables, une fois obtenues toutes les autorisations, notamment en Australie.
«L’acquisition de BG, qui demeure sur les rails pour une finalisation début 2016, représente une rampe de lancement qui permettra à Shell de se concentrer dans des domaines moins nombreux et plus rentables, en particulier les activités en eau profonde et le gaz», a souligné Ben van Beurden.
Avec un baril actuellement inférieur à 50 dollars, les difficultés ne concernent pas que Shell mais l’ensemble du secteur, avec plus ou moins de force.
Le britannique BP a vu son bénéfice net réduit à néant au troisième trimestre au cours duquel l’italien Eni est tombé dans le rouge, tandis que le français Total a vu ses résultats fortement baisser, mais moins que prévu grâce au déploiement d’un vaste plan d’économies et à une hausse de la production.
Verdict vendredi pour BG Group, qui doit dévoiler ses résultats, le même jour que les géants américains ExxonMobil et Chevron.
AFP/M.R.