Les actionnaires de PSA et ceux de Fiat Chrysler ont validé lundi l’union de leurs deux groupes. Ce mariage franco-italo-américain vise à atteindre une taille critique sur un marché automobile en pleine révolution.
L’union PSA-FCA va donner naissance au quatrième groupe automobile mondial en termes de véhicules vendus, et au troisième en chiffre d’affaires derrière le japonais Toyota et l’allemand Volkswagen.
Après le vote des actionnaires du français PSA lundi matin, les actionnaires du constructeur automobile italo-américain Fiat Chrysler (FCA), réunis en assemblée générale virtuelle, ont voté à leur tour à 99,15% en faveur du projet de fusion avec le groupe français Peugeot-Citroën (PSA). Sa date effective doit être annoncée « très rapidement » selon le président du directoire de PSA et futur directeur général du nouveau groupe baptisé Stellantis, Carlos Tavares.
Stellantis comptera plus de 400 000 salariés et abritera dans le même garage 14 marques emblématiques comme Citroën et Maserati (déjà brièvement mariées il y a 50 ans), Fiat et Opel, Peugeot et Alfa Romeo, Chrysler, Dodge ou Jeep.
« J’ai rarement eu le sentiment autant qu’aujourd’hui de vivre un moment d’histoire », a déclaré l’emblématique président du conseil de surveillance de PSA, Louis Gallois, qui prend sa retraite à l’issue de cette fusion.
« Cette fusion était une question de survie, et ça vaut pour Fiat comme pour PSA », selon Giuliano Noci, professeur de stratégie à l’école de commerce de Polytechnique à Milan. Les deux groupes sont confrontés à « d’énormes défis technologiques et stratégiques » (véhicules électriques, numérisation, conduite autonome) et aux effets dévastateurs de la pandémie de Covid-19.
« Seuls les plus agiles, dans un esprit darwinien, survivront », avait lancé en novembre Carlos Tavares.
Les marques du groupe vont notamment réduire leurs coûts de développement et de construction, et compléter leur offre dans toutes les gammes.
« Grâce à son union avec PSA, Fiat-Chrysler pourra renforcer sa présence en Europe », ajoute Giuseppe Berta, professeur à l’université Bocconi de Milan et spécialiste de Fiat. « A l’inverse, le groupe français pourra reprendre pied aux Etats-Unis grâce à son allié italo-américain ».
Une fusion amendée
Le vote des actionnaires scelle une union envisagée depuis 2018, annoncée fin 2019, et dont la préparation a été ralentie par la crise du coronavirus.
Fin décembre, la Commission européenne a donné son feu vert au mariage de la Fiat 500 et de la Peugeot 208, sous condition que les deux groupes respectent leurs engagements pris pour préserver la concurrence dans les petits utilitaires, où ils détiennent de larges parts de marché.
Ils avaient auparavant amendé leur contrat pour que leur union reste un mariage entre égaux, alors que la pandémie a affecté leurs comptes respectifs.
FCA a notamment accepté d’abaisser le montant d’un dividende exceptionnel versé à ses actionnaires. De son côté, PSA a décidé de céder 7% de l’équipementier français Faurecia avant de distribuer le reste aux actionnaires de Stellantis. La participation du groupe chinois Dongfeng doit être également réduite.
C’est insuffisant selon le fonds Phitrust, qui détient moins de 1% du capital de PSA et critique depuis l’annonce de la fusion un manque d' »équilibre entre les parties » au profit des Italo-Américains.
« FCA a plus besoin de PSA pour la mise en oeuvre des synergies que l’inverse » et « PSA est plus performant que FCA sur différents aspects clés », a notamment souligné le fonds.
Pas de fermeture d’usine ?
Dans les documents fournis aux autorités financières, PSA et Fiat estiment que leur rapprochement devrait coûter 4 milliards d’euros, et que les synergies permettront d’économiser à terme jusqu’à 5 milliards par an.
Carlos Tavares avait souligné fin 2019 qu’aucune fermeture d’usine n’était prévue. Les syndicats se permettent d’en douter.
« Globalement c’est une bonne assurance pour l’avenir de notre groupe. Ceux qui ne prendront pas ce virage-là risqueront de rester sur le carreau », commente Franck Don, délégué syndical central CFTC chez PSA.
« Aujourd’hui, le groupe FCA est une grande inconnue pour nous », tempère cependant le syndicaliste. « Quelles synergies vont être trouvées? Quelles conséquences potentielles sur les sites situés en France? »
Christine Virassamy, déléguée syndicale centrale CFDT, attend un engagement ferme de Stellantis sur les usines comme sur les centres de recherche. « C’est le volet social et éthique qui permettra de dire si cette fusion est une réussite ou pas », souligne-t-elle.
Phitrust avertit que Fiat n’a pas de marges de manoeuvre en Italie, où il a contracté un prêt garanti par l’Etat à hauteur de 6 milliards d’euros. « Les usines françaises de PSA pourraient devenir la variable d’ajustement, entraînant de lourdes pertes d’emplois », avance le fonds.
AFP