Malgré les pressions croissantes du gouvernement français, le syndicat CGT et la direction de TotalEnergies n’avaient toujours pas ouvert de négociations lundi sur une hausse des salaires, après presque deux semaines de grève qui provoquent d’importantes pénuries de carburants dans certaines régions en France.
Le groupe pétrolier et gazier a proposé dimanche d’avancer à octobre (sans date précise) les négociations salariales prévues en novembre, à condition que les raffineries et dépôts actuellement bloqués reprennent le travail. Un « chantage », a répondu ce lundi matin la CGT, à l’origine du mouvement de grève, en promettant une prise de position après discussions avec les grévistes à la mi-journée.
La situation dans le plus grand groupe pétrolier français, qui contrôle le tiers des stations-service du pays, tranche avec celle chez Esso-ExxonMobil, dont les deux raffineries françaises sont à l’arrêt mais chez qui une réunion doit avoir lieu dès ce lundi avec les syndicats. « TotalEnergies essaie d’imposer une suspension de la grève avant toute réunion de négociation et donc avant toute proposition d’augmentation salariale. Cette tentative est perçue comme un chantage par la CGT et ne garantit en rien la satisfaction des revendications exprimées et donc la reprise du travail », a estimé le syndicat dans un communiqué.
« Le chantage, actuellement, ce sont les Français qui le vivent, donc l’objectif c’est bien de sortir de cette situation », avait déclaré un peu plus tôt sur la chaîne BFMTV Jean-Marc Durand, directeur du raffinage Europe du groupe. « On souhaite que ceux qui embêtent les Français cessent le plus tôt possible, donc on souhaite que pour s’asseoir à la table des négociations, on puisse le faire dans une atmosphère sereine, et pas sous un système de blocage », a-t-il poursuivi.
L’exécutif « met la pression »
Selon un dernier décompte diffusé par le ministère de la Transition énergétique dimanche à la mi-journée, près d’un tiers (29,7%) des stations-service de France manquaient d’au moins un carburant (contre 21% samedi). Les Hauts-de-France (nord) et la région parisienne étant plus particulièrement touchés.
De quoi provoquer une certaine inquiétude jusqu’au sommet de l’État, qui a poussé le président Emmanuel Macron à appeler vendredi, depuis Prague, pétroliers et syndicats à la « responsabilité » et les automobilistes au calme.
Cette grève intervient en effet à quelques jours d’une marche « contre la vie chère », dimanche prochain à Paris, à laquelle appelle l’opposition de gauche au Parlement.
Sur la radio RTL, en marge d’un déplacement en Algérie, la Première ministre Elisabeth Borne a ainsi appelé lundi matin direction et représentants des salariés « à se mettre autour de la table ».
La direction du groupe veut que les négociations portent sur les salaires de 2023. Mais compte tenu de la forte inflation, c’est de 2022 que souhaite parler la CGT, qui réclame depuis plusieurs semaines une renégociation de la hausse moyenne de 3,5% de début d’année. Elle demande pour 2022 10% de hausse : 7 % pour l’inflation, 3 % pour le « partage de la richesse », TotalEnergies ayant engrangé 10,6 milliards de dollars de bénéfice au premier semestre.
En attendant, la mobilisation se poursuivait à la raffinerie de Normandie, la plus grande de France, près du Havre (nord-ouest), à la « bio-raffinerie » de La Mède (sud) et au dépôt de carburants de Flandres (nord), alors que la raffinerie de Feyzin (centre) est également à l’arrêt en raison d’un accident technique.
Du côté d’Esso-ExxonMobil, ses deux raffineries de Notre-Dame-de-Gravenchon (Normandie) et de Fos-sur-Mer (sud) étaient toujours à l’arrêt, les grévistes CGT ayant décidé lundi de reconduire la grève.
La Confédération patronale des petites et moyennes entreprises (CPME) a, elle, demandé aux pouvoirs publics de prendre des mesures « y compris juridiques, telles que des réquisitions » pour assurer le fonctionnement des raffineries en grève.