Une des attributions du G20, qui tiendra sommet vendredi et samedi à Hambourg, est de lutter contre les flux financiers illégaux ou douteux. Liste noire des paradis fiscaux, obstacles à l’optimisation fiscale des multinationales, transparence des trusts, combat contre le financement du terrorisme…
Voici un point sur les chantiers en cours du G20 sur ce dossier. A Hambourg, l’OCDE remet sa copie au G20 qui lui avait demandé une liste noire des pays non coopératifs dans la lutte contre l’évasion fiscale lors de son précédent sommet en Chine. Les dirigeants des principales économies mondiales n’y découvriront qu’un seul nom, celui de Trinidad-et-Tobago, un petit pays caribéen. Plusieurs ONG crient déjà au scandale. « Cette liste vide est ridicule », a affirmé Manon Aubry, porte-parole d’Oxfam en France. « Qui peut croire qu’il n’y a pas de paradis fiscaux dans le monde quand un scandale éclate presque toutes les semaines », s’est-elle indignée.
Pour le directeur du Centre de politique et d’administration fiscale de l’OCDE, Pascal Saint-Amans, il ne s’agit que d’un premier pas. « C’est le problème des listes qui fonctionnent », a-t-il expliqué. Menacés d’être mis à l’index par la communauté internationale, les pays concernés ont tout fait pour éviter de se retrouver sur la liste. « Ça confirme que la méthode de la pression était la bonne, l’objectif était d’agiter la menace », a abondé une autre source proche des négociations en cours au G20, sous couvert d’anonymat.
A Bruxelles, le travail de l’OCDE est certes jugée « utile », mais la Commission européenne souhaite aller plus loin en élaborant elle-même sa propre liste des paradis fiscaux. « Elle sera prête cet automne et elle sera, je l’espère, assortie de sanctions », a assuré le commissaire Pierre Moscovici. « La vraie prochaine étape c’est l’échange automatique de renseignements qui s’appliquera dès 2018 », affirme Pascal Saint-Amans. « Nous saurons dès la fin de cette année si les États sont en mesure appliquer leurs engagements », a-t-il ajouté, en réponse aux ONG qui dénoncent les critères insuffisants pour l’établissement de la liste.
Après LuxLeaks et les Panama Papers
Concrètement, l’objectif est que les pays échangent de manière automatique les données fiscales de leurs contribuables, et non plus à la demande expresse d’un autre pays. Menacés de nouveau d’apparaître sur la liste noire, les États devront s’y plier pour éviter de figurer aux côtés de Trinidad-et-Tobago l’année prochaine. Les membres du G20 ont signé fin 2015 un accord contre l’érosion des bases fiscales et les transferts de bénéfices (BEPS en anglais). En d’autres termes, d’empêcher les multinationales de transférer leurs bénéfices d’un pays à un autre pour contourner l’impôt grâce à des stratégies comptables sophistiquées. L’OCDE va vérifier que les pays appliquent bien quatre standards inclus dans BEPS : la fin des pratiques fiscales dommageables, le reporting pays par pays, l’amélioration des procédures amiables et le chalandage fiscal (treaty shopping). « Nous pourrons informer le G20 pour éventuellement dénoncer ceux qui ne l’appliquent pas », assure Pascal Saint-Amans.
Le G20 a pris ce dossier en main après le scandale LuxLeaks, qui a éclaté fin 2014 et qui avait mis en lumière un système d’évasion fiscale à grande échelle et particulièrement le rôle joué par le Luxembourg. Pour l’élaboration de ses prochaines listes, l’OCDE va également se pencher sur les trusts qui permettent de dissimuler les noms de leurs propriétaires. Le scandale des Panama Papers avait révélé l’an dernier que ces structures financières anonymes permettaient à des individus ou des sociétés de passer entre les mailles des filets.
« Le standard s’est un peu durci sur les bénéficiaires effectifs. Pour que les pays restent au niveau, il va falloir qu’ils progressent », a indiqué Pascal Saint-Amans. L’OCDE présentera un rapport sur ce sujet lors du sommet du G20 de 2018. Le G20 s’est également fixé l’objectif de lutter contre le financement du terrorisme. « Ce sera un des sujets importants » à Hambourg, a indiqué une source proche du dossier.
Le Quotidien/AFP