Malgré le soutien de deux ministres, la direction de Guardian semble persévérer dans sa volonté de se séparer au plus vite de près de la moitié de ses salariés.
Après une entrevue avec les délégations du personnel de la société Guardian et avec les partenaires sociaux, le ministre de l’Économie, Franz Fayot, et le ministre du Travail, Dan Kersch, se sont positionnés en faveur d’un dialogue social et de l’utilisation des outils pouvant limiter la casse lors d’un licenciement massif. Mais, visiblement, cet appui du gouvernement laisse de marbre la direction du groupe américain. Explications.
Depuis plusieurs mois, l’OGBL et les salariés de Guardian demandent à la direction de répondre à leurs questions afin de dissiper les inquiétudes autour de l’avenir d’environ 200 personnes sur 453 salariés.
En effet, après l’annonce d’une fusion de ses deux sites luxembourgeois, la direction de Guardian a annoncé vouloir se séparer de 44% de ses effectifs dans le pays, et ce, à partir du 2 septembre prochain. Pour cela, Guardian veut s’appuyer sur un plan de maintien de l’emploi puis un plan social. Mais l’OGBL et la délégation du personnel ne l’entendent pas de cette oreille et ont demandé à la direction de prendre le temps afin de trouver des solutions pour mettre sur pied un plan de maintien de l’emploi digne de ce nom et, surtout, de limiter la casse sociale.
Pour les soutenir, les salariés ont reçu l’appui du ministre de l’Économie, Franz Fayot, et du ministre du Travail, Dan Kersch. «Les deux ministres ont pris leurs responsabilités. Franz Fayot a souligné qu’il irait jusqu’aux États-Unis, lorsque cela sera possible, pour convaincre le groupe américain de continuer ses investissements au Luxembourg. Dan Kersch a de son côté écrit une lettre à la direction de Guardian en demandant qu’elle utilise l’ensemble des outils disponibles dans un plan de maintien de l’emploi», s’est félicité Alain Rolling, secrétaire central adjoint à l’OGBL en charge du dossier et qui a participé mardi à l’entrevue avec les deux ministres.
Dans un communiqué, le ministre de l’Économie a d’ailleurs exprimé «sa compréhension pour la situation difficile dans laquelle se trouvent les salariés et l’incertitude à laquelle sont confrontées leurs familles. Soulignant l’importance du dialogue social, le ministre de l’Économie a assuré aux représentants syndicaux que le gouvernement soutient, dans l’intérêt des salariés concernés, le recours aux différents instruments relatifs au plan de maintien dans l’emploi, comme la mise en préretraite-ajustement ou la prise en charge des frais pour des formations de requalification.»
Le ministre socialiste a également souligné être prêt, lorsque la situation le permettra, à se rendre aux États-Unis pour «y rencontrer les dirigeants de Guardian afin de les convaincre de garder, voire de consolider, l’empreinte industrielle du groupe américain au Luxembourg».
La direction survole la lettre du ministre Kersch
Mais le soutien des deux ministres ne semble pas impressionner plus que cela la direction actuelle de Guardian. D’ailleurs, à la sortie d’une réunion lundi entre la délégation du personnel, l’OGBL et la direction de Guardian, Alain Rolling n’a pas caché sa déception : «Cette direction ne cherche pas de solutions. Quand une direction nous annonce avoir seulement ‘survolé’ la lettre du ministre Kersch, on comprend très vite le manque de respect. Guardian ne veut pas trouver de solutions, elle ne veut pas utiliser les outils d’un plan de maintien de l’emploi, à part quelques préretraites. Je le répète, ils ne veulent pas trouver de solutions ni même ouvrir un dialogue social et veulent juste imposer leurs chiffres.»
Autre point qui montre la volonté de la direction de précipiter les choses, c’est le refus de reporter la date du 2 septembre. «Ils veulent un plan de maintien de l’emploi pour le 2 septembre prochain. Dans huit jours ! C’est tout simplement impossible de mettre cela sur pied en si peu de temps. Et sur ce point, nous avons là encore le soutien du ministre du Travail, qui a souligné dans sa lettre à la direction l’importance de prendre le temps d’utiliser l’ensemble des outils existants pour mettre sur pied un plan de maintien de l’emploi», peste Alain Rolling.
La colère monte petit à petit dans les rangs des salariés et de l’OGBL qui ne cachent pas redouter le pire car l’affaire prend la direction d’un conflit social qui pourrait déboucher vers l’Office national de conciliation et des actions syndicales dans les semaines à venir.
Jeremy Zabatta