Instrument de lutte contre le chômage, le chômage partiel est financé par des fonds publics. Une dépense assumée.
Jamais encore au Luxembourg n’avait-on débloqué une telle somme pour sauver les entreprises de la crise et, par là même, l’économie du pays. S’il n’est qu’une partie de la solution, le gouvernement a débloqué plus de 372 millions d’euros de fonds directs pour financer le chômage partiel. Un total de 9 933 entreprises se partagera cette somme pour rémunérer leurs 180 000 salariés. Ces deux derniers mois, 14 728 demandes sont parvenues au ministère du Travail.
«Ces sommes seront versées aux entreprises dès aujourd’hui ou demain si elles ne l’ont pas encore été», a indiqué le ministre Dan Kersch à l’occasion d’une conférence de presse mardi. Ces avances sont calculées sur la base du salaire moyen dans une entreprise et doivent garantir aux employés de ne pas toucher moins que le salaire minimum garanti. Elles ne doivent pas non plus excéder 5 355 euros.
Les banques sont redevables
Il reste un nombre important de demandes à traiter : 2 616 de la part de 2 003 entreprises. Elles représentent 32,9 millions d’euros supplémentaires d’aide aux entreprises en chômage partiel, soit 17 742 salaires. Cette somme provenant du Fonds pour l’emploi est uniquement destinée aux salariés. Un autre usage serait considéré comme un détournement de fonds publics et donc comme un délit punissable. Le ministère aurait déjà eu vent d’abus de la part d’une petite minorité d’entreprises. Un projet de loi que le ministre va déposer au Conseil de gouvernement ce mercredi prévoit un raffermissement des peines pour ce type de fraudes.
À la date du 14 avril, 377 demandes étaient encore en suspens. Elles représentent une somme de 6,1 millions d’euros à répartir entre 3 111 salariés. Pour le moment, 320 demandes principalement issues des secteurs financier et des assurances ont été refoulées, soit l’équivalent de 47,7 millions d’euros. Le gouvernement a estimé que ces deux secteurs n’étaient pas en crise. Dan Kersch n’exclut pas qu’elles puissent être traitées de manière différente s’il est prouvé que ces secteurs sont touchés par des problèmes réels.
De toute manière, le ministre est d’avis que les pays ont aidé les banques à se redresser lors de la crise financière de 2012 et qu’il est temps à présent pour les banques d’être redevables «par solidarité» mais aussi par «conscience économique».
Les faibles ne seront pas sacrifiés
Dan Kersch a également annoncé une mesure en faveur des entreprises en retard de paiement de leurs charges sociales. 531 en tout. «Étant donné la situation, nous n’allons pas les laisser tomber, a annoncé le ministre. Les entreprises qui ont moins de trois mois de retard vont obtenir une réduction de 10 % de leurs avances et celles qui ont plus de trois mois, une réduction de 20 %. Nous avons pris cette décision dans l’intérêt de leurs 4 456 salariés. Nous ne l’avons pas fait parce que nous estimons normal de ne pas régler ces charges sociales. Il s’agit d’une pratique inacceptable. Nous l’avons fait dans l’intérêt des salariés, de la survie des entreprises et de l’économie luxembourgeoise dans son ensemble.»
Le gouvernement a voulu donner une chance de survie à chaque entreprise en dégainant le chômage partiel. Hors de question de sacrifier les plus faibles au profit des plus puissants. «Les épaules les plus larges porteront les charges plus lourdes», estime le ministre, qui évoque l’équité et la solidarité. Une vision partagée par les partenaires sociaux et les syndicats qui, malgré la crise, ont su préserver le dialogue social.
« Une note positive » pour conclure
Dan Kersch a également rappelé un certain nombre de mesures prises pour sauver les salariés en temps de crise. Elles ont mené à une modification du code du travail. Il s’agit notamment des indemnités minimales en cas de chômage partiel, des protections contre les licenciements, du congé pour raison familiales, des délais pour les chômeurs et les salariés à l’essai ou de la suspension des plans sociaux.
Enfin, en ce qui concerne l’extension des horaires de travail par jour et par semaine, 19 demandes ont été introduites. Quatre ont été refusées. Une est en suspens. Les autres ont été approuvées. La majorité sont issues du secteur des soins et concernent plus de 3 700 salariés dans un secteur qui en compte deux mille de plus. Deux autres proviennent du secteur du gardiennage et une du secteur de la gestion de déchets.
Dan Kersch a souhaité clôturer sa conférence de presse par une «note positive». Un groupe de travail œuvre actuellement sous la direction du directeur de l’Inspection du travail et des mines à l’élaboration de règles «liantes, compréhensibles de tous et contrôlables» pour la sortie du confinement et le retour en entreprise. Le ministre les remettra sous forme de règlement grand-ducal «vendredi» au Conseil de gouvernement.
Sophie Kieffer