Bruxelles a présenté mardi des solutions pour amortir l’impact de la flambée des prix énergétiques et réduire de deux tiers les importations de gaz russe de l’UE dès cette année, avant un sommet où les Vingt-Sept devraient s’engager à « sortir » de la dépendance aux hydrocarbures russes.
La Commission européenne soumettra d’ici avril une proposition législative pour établir un niveau moyen de stockage d’au moins 90% d’ici fin septembre, afin de préparer le continent au prochain hiver, avec des objectifs pour chaque pays, a annoncé la commissaire à l’Énergie Kadri Simson. Le projet évoquait initialement un niveau de 80%.
Outre un recours accru à l’hydrogène et au biométhane, la Commission veut diversifier tous azimuts les approvisionnements gaziers de l’UE, en intensifiant les pourparlers déjà engagés avec les principaux pays producteurs (Norvège, États-Unis, Qatar, Algérie), tout en coordonnant mieux l’utilisation des terminaux et gazoducs en Europe.
L’UE appelle aussi à accélérer les efforts de décarbonation dans les bâtiments (meilleure isolation, modes de chauffage…) et dans l’industrie, prévu dans son plan climat pour 2030 : « sa mise en œuvre complète permettrait de réduire la consommation européenne annuelle de gaz de 30% », estime Bruxelles.
Les mesures présentées « peuvent réduire la demande européenne de gaz russe de deux tiers d’ici à la fin de l’année » et « rendre l’UE indépendante des hydrocarbures russes bien avant 2030 », a assuré l’exécutif européen dans un communiqué. La Russie fournit 45% des importations de gaz et de charbon de l’UE, et 25% de celles de pétrole.
La feuille de route sera discutée jeudi et vendredi par les chefs d’État et de gouvernement des Vingt-Sept réunis à Versailles (France). Ils devraient s’engager à « sortir de (leur) dépendance aux importations de gaz, pétrole et charbon russe », mais sans préciser de calendrier, selon un projet de conclusions.
Modération de l’impact sur les factures
Un défi pour des pays comme la Finlande, la Slovaquie, la Hongrie ou la République tchèque qui importent l’essentiel de leur gaz de Russie, ou encore l’Allemagne, dépendante à 55% de la Russie pour ses approvisionnements. Berlin a rappelé qu’il n’existait aucune alternative pour s’en affranchir « pour le moment ».
La Commission elle-même appelle à une rupture progressive : « Ne nous faisons pas davantage de mal qu’on en fait à Poutine. Il ne faut pas déstabiliser nos sociétés à un moment où nous devons rester unis », a reconnu lundi devant les eurodéputés le vice-président de l’exécutif européen, Frans Timmermans.
Dans l’immédiat, Bruxelles veut modérer l’impact sur les factures des ménages et des entreprises en élargissant la « boîte à outils » dévoilée à l’automne: une panoplie de mesures (régulation des prix, aides directes, abattements fiscaux, suppression de la TVA…) que les États peuvent adopter face à la crise de l’énergie.
Au-delà de conditions déjà assouplies pour les aides publiques, la Commission permettra aux États de taxer les bénéfices des entreprises énergétiques générés par la flambée des cours afin de les redistribuer, mais à condition de « ne pas générer de distorsion inutile du marché ».
La Commission envisage par ailleurs des mesures d’urgence pour limiter l’effet de contagion des cours du gaz aux prix de gros de l’électricité, notamment avec un plafonnement temporaire de ces derniers.
En revanche, si le recours temporaire au charbon n’est pas « tabou » pour les pays voulant diminuer rapidement leurs importations de gaz russe, « cela ne les dispense pas de leur engagement à atteindre » leurs objectifs de réduction des gaz à effet de serre pour 2030 et il faut donc une accélération sur les renouvelables en parallèle, a averti Frans Timmermans.