L’OCDE a confirmé jeudi les craintes sur la santé de l’économie mondiale, en amputant ses prévisions de croissance pour la seconde fois en trois mois, «déçue» à la fois par le ralentissement des pays émergents et la «très modeste» reprise des économies avancées.
L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) table désormais sur une croissance mondiale de 3% pour cette année, contre 3,3% en novembre dernier quand elle avait déjà amputé ses prévisions de 0,3 point.
«Les perspectives qui se dessinent sont celles d’une croissance mondiale quasiment stationnaire (…). Les indicateurs laissent entrevoir un ralentissement de la croissance dans certaines grandes économies», a expliqué Catherine Mann, chef économiste de l’OCDE, lors de la présentation des perspectives actualisées.
A l’image du Fonds monétaire international (FMI), qui a également revu à la baisse ses chiffres en janvier, l’organisation basée à Paris craint les conséquences de la baisse des cours du pétrole et des matières premières, ainsi que celles du ralentissement de l’économie chinoise.
Le ralentissement est «généralisé», relève l’OCDE, soulignant qu’il n’y a pas vraiment de locomotive qui tire la croissance, comme ces dernières années quand celle des émergents pouvait compenser les ralentissements des pays développés.
«La croissance du PIB mondial ne devrait pas être supérieure cette année à celle de l’année dernière, qui était déjà la plus lente des cinq dernières années», a-t-elle prévenu dans la révision de ses prévisions économiques. Pour 2017, elle abaisse également sa première prévision publiée il y a trois mois de 3,6 à 3,3%, ne s’attendant désormais qu’à un très léger rebond de la croissance.
«La croissance ralentit dans de nombreuses économies émergentes et la reprise est très modeste dans les économies avancées avec des prix bas qui dépriment les exportateurs de matières premières», constate l’OCDE, qui taille dans pratiquement toutes ses prévisions.
Elle ampute de 0,5 point les prévisions de croissance pour les Etats-Unis, à 2%, et pour l’Allemagne à 1,3%. La France reste pratiquement stable (-0,1 point) à 1,2%, soit un niveau inférieur au 1,5% de croissance attendu par le gouvernement.
Si les prévisions pour la Chine restent sans changement, à 6,5%, et celles de l’Inde gagnent même 0,1 point, à 7,4%, le Brésil est le pays le plus sévèrement dégradé par l’OCDE, qui prévoit désormais une récession atteignant -4% en 2015, contre -1,2% il y a trois mois.
Instabilité financière
Commentant les très fortes baisses des marchés financiers depuis le début de l’année, l’institution basée à Paris alerte également des «risques substantiels d’instabilité financière» et prévient que certaines économies émergentes «sont particulièrement vulnérables à des mouvements aigus des taux de change et aux effets d’une forte dette domestique» libellée en dollars.
«L’augmentation rapide de la dette privée dans les pays émergents et le niveau relativement élevé d’endettement à des niveaux historiques constituent un risque clef dans de nombreuses économies émergentes, notamment la Chine», estime l’organisation qui regroupe les économies développées et les principales émergentes.
A quelques jours d’une réunion des ministres des Finances du G20 à Shanghai, l’OCDE plaide pour «une réponse politique collective plus forte afin de renforcer la demande», constatant que «la politique budgétaire est aujourd’hui restrictive dans la plupart des grandes économies» et que la politique monétaire menée par les banques centrales atteint ses limites pour relancer la croissance.
«Les Etats peuvent actuellement emprunter à long terme à des taux d’intérêt très bas», souligne l’organisation, constatant que de nombreux pays ont aujourd’hui de la marge pour renforcer la demande à travers la politique budgétaire».
«Un engagement à augmenter collectivement l’investissement public donnerait une impulsion à la demande tout en restant sur un rythme budgétaire soutenable», assure-t-elle.
Enfin, elle s’inquiète de la situation en Europe et appelle les pays membres à «parler d’une seule voix afin de promouvoir l’unité et la croissance», citant notamment les divergences surgies lors de la crise des migrants, «les menaces extérieures à la sécurité, l’impopularité des mesures d’austérité et les forces centrifuges dans un certain nombre de pays».
«Ces incertitudes politiques risquent de ralentir encore plus les investissements et pourraient conduire à des conditions financières plus difficiles», explique l’organisation.
AFP