Avec l’acquisition de nouvelles usines de production en Europe, dont le site ArcelorMittal de Dudelange, la société britannique a exprimé ses ambitions. L’OGBL, de son côté, attend encore de voir du concret.
Ce n’était qu’une question de temps après le feu vert de la Commission européenne en avril dernier. Depuis ce lundi, l’usine d’ArcelorMittal de Dudelange est désormais la propriété de Liberty House via Liberty Steel, filiale du groupe GFG Alliance du Britannique Sanjeev Gupta.
Sans entrer dans les détails, Liberty House a expliqué dans un communiqué de presse avoir finalisé l’acquisition de sept aciéries et de cinq centres de services appartenant au géant ArcelorMittal pour la somme de 740 millions d’euros. Une opération qui fait doubler les effectifs du groupe ayant son siège à Londres, passant de 16 000 personnes à près de 30 000 salariés. Au niveau de la production, Liberty Steel se positionne désormais, selon le communiqué, dans le « top 10 des producteurs dans le monde, hormis la Chine, avec une capacité de plus de 18 millions de tonnes » d’acier. À titre de comparaison, ArcelorMittal a produit l’année dernière 92,5 millions de tonnes d’acier brut.
De son côté, ArcelorMittal a annoncé avoir déjà reçu fin juin 610 millions d’euros de produit des cessions de ses aciéries. Reste à Liberty House à déposer un engagement de 110 millions d’euros. Des sommes qui serviront à ArcelorMittal pour acquérir de son côté l’italien Ilva pour 1,8 milliard d’euros.
Désormais, le groupe de Sanjeev Gupta est un acteur qui commence à se faire une belle place dans le monde de la sidérurgie. Mais outre ses acquisitions, le magnat britannique semble avoir de hautes ambitions. Il y a quelques mois, il avait annoncé vouloir « réindustrialiser la France ». Hier, dans son communiqué, le président directeur de GFG a indiqué que cette acquisition était « une étape importante et passionnante dans le parcours de GFG. Nous sommes extrêmement fiers d’accueillir des milliers d’employés qualifiés et engagés dans la famille GFG. Nous sommes impatients de travailler ensemble pour créer un avenir brillant et durable pour notre groupe et notre secteur. Ces activités constituent un élément clé de notre stratégie mondiale pour l’acier, consistant à créer une entreprise de l’acier durable, dotée d’une chaîne de valeur entièrement intégrée, allant des matériaux bruts aux produits finis à haute valeur ajoutée, distribués sur des marchés de grande qualité. »
Le groupe espère même augmenter ses ventes sur ces sites d’environ 50 % en trois ans.
Le scepticisme de l’OGBL
Mais pour le moment, le groupe a annoncé commencer « un audit de 100 jours durant lequel Liberty House–Liberty Steel, avec l’aide de la direction locale, des syndicats, de ses clients et de ses fournisseurs, fournira une analyse exhaustive de ses activités pour explorer les possibilités d’investissements et développer des projets détaillés destinés à augmenter sa compétitivité, développer sa gamme de produits et soutenir la croissance de ses ventes ».
Du côté de l’OGBL, on reste pessimiste et curieux d’observer la stratégie de Liberty House. « S’il y a bien des contacts avec le comité européen, la stratégie de Liberty House reste encore floue pour nous, regrette Jean-Claude Bernardini, secrétaire central et membre du bureau exécutif de l’OGBL. On a entendu des chiffres, 10 millions d’euros d’investissements, mais sans savoir si c’est à Dudelange ou à Liège ou bien pour les deux sites. On lit que Liberty House souhaite développer sa gamme de produits, mais on sait également qu’ils ont passé un accord avec ArcelorMittal pour produire l’Usibor pendant deux ans. Donc, nous sommes curieux de savoir comment Liberty House va produire pour ArcelorMittal tout en développant une gamme de produits. Tout comme nous sommes curieux de savoir comment ils vont augmenter leurs ventes de 50 % en trois ans. »
Le syndicaliste poursuit : « D’un autre côté, Liberty House a souligné vouloir garder tout le monde à Dudelange. Après, ce n’était qu’un accord verbal. Disons que pour le moment nous attendons de voir et de vérifier par du concret. Car ce qui nous interpelle aussi, c’est le fait que Liberty House annonce faire un audit de 100 jours pour analyser ses activités. On espère qu’un groupe qui vient de dépenser 740 millions d’euros n’a pas attendu pour faire cette analyse. »
Jeremy Zabatta