Le Sénat américain a rédigé mardi une proposition de budget à court terme de dernière minute, même s’il y a peu de chances qu’elle soit approuvée par la Chambre des représentants, pendant que le décompte est lancé pour éviter une paralysie des services de l’État fédéral à la fin de la semaine.
À quelques jours de la date limite du 30 septembre, le chef de la majorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, et le chef de la minorité républicaine, Mitch McConnell, ont tous deux approuvé ce projet, qui permettrait au gouvernement de continuer à fonctionner jusqu’au 17 novembre. Mais rien n’indique pour l’instant que les factions rivales des républicains de la Chambre des représentants, qui ont déclenché l’épreuve de force, approuveront à leur tour ce texte s’il est adopté par le Sénat.
Si l’impasse persiste, tous les financements des services fédéraux seront soudainement coupés. Le fameux « shutdown ».
Ministères, mais aussi parcs nationaux, trafic aérien, certains musées et une multitude d’organismes seraient affectés, forçant des centaines de milliers de fonctionnaires au chômage technique.
« Fermer le gouvernement pour un différend budgétaire interne ne renforce la position politique de personne », a déclaré M. McConnell. « Cela ne fait que geler des progrès importants. Et cela laisse des millions d’Américains dans l’incertitude », a-t-il ajouté.
La Maison-Blanche s’est jointe à M. McConnell pour implorer le Congrès d’adopter le texte du Sénat. « Il est temps que les républicains de la Chambre des représentants commencent à faire leur travail », a déclaré le président Joe Biden lors d’un événement de campagne mardi soir.
L’aide à l’Ukraine très incertaine
Cette crise budgétaire pourrait surtout avoir des répercussions directes sur la guerre en Ukraine. La Maison Blanche avait initialement réclamé que la loi de finances votée par les élus comprenne 24 milliards de dollars d’aide militaire et humanitaire pour Kiev.
Conscient du risque de lassitude de la part du grand allié américain, le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’était rendu jeudi dernier au Congrès pour tenter de convaincre les États-Unis de l’aider à passer « la ligne d’arrivée » face à la Russie.
Mais le déblocage d’un tel montant paraît de plus en plus incertain, au vu de la direction que prennent les tractations en coulisses: le texte qui circulait mardi au Sénat comprenait le quart de cette somme, environ 6 milliards de dollars.
Or, la Chambre, dominée par les conservateurs depuis janvier, ne veut même pas entendre parler de ce projet de loi. « Ils privilégient l’Ukraine aux dépens des Américains », a accusé son chef républicain, Kevin McCarthy, réclamant à la place des financements pour lutter contre l’immigration clandestine.
Une poignée d’élus trumpistes, avec qui le président de la Chambre a dû faire nombre de compromis pour accéder au perchoir, appellent à cesser immédiatement l’aide à Kiev.
Trublions trumpistes
Ce sont ces mêmes élus, partisans d’une orthodoxie budgétaire très stricte, qui avaient poussé les États-Unis au bord du précipice politico-financier il y a quatre mois.
La première puissance mondiale avait alors évité in extremis un défaut de paiement à la suite de longues négociations entre l’administration Biden et les conservateurs.
Les lieutenants de Donald Trump disposent d’un pouvoir disproportionné au Congrès américain en raison de la très fine majorité des républicains à la Chambre.
Et ils ont reçu l’ordre de la part de l’ancien président, candidat en 2024, de « paralyser » l’État fédéral, à moins d’obtenir gain de cause sur « tous » les dossiers budgétaires en débat.
C’est sous la présidence de l’ancien dirigeant républicain que les États-Unis avaient traversé leur plus long « shutdown », à l’hiver 2018. Selon plusieurs estimations, le PIB des États-Unis avait alors été amputé de plus de 3 milliards de dollars.