La monnaie russe est tombée mercredi à son plus bas niveau historique face au dollar, sous le coup de l’effondrement sans fin des cours du pétrole qui enfonce la Russie dans la crise économique.
Le début d’année tourne au cauchemar pour les Russes qui ont vu leur pouvoir d’achat plonger l’an dernier et voient désormais toute perspective d’amélioration s’éloigner au fur et à mesure que le baril d’or noir perd de sa valeur. Le dollar a franchi le seuil psychologique des 80 roubles, puis atteint 81,93 roubles à la Bourse de Moscou.
Le rouble ne s’est jamais échangé à ce niveau depuis que la Russie a enlevé trois zéros à sa monnaie, au moment de la grave crise financière de 1998. Jusqu’à présent, la devise russe s’était maintenue au-dessus de ses pires niveaux des journées noires de décembre 2014, quand un vent de panique s’était emparé des investisseurs et des Russes et que le rouble s’était brutalement effondré avant de remonter.
L’euro s’est quant à lui hissé jusqu’à 89,42 roubles, un pic depuis décembre 2014. La monnaie unique européenne avait alors atteint 100 roubles. « Le rouble qui baisse, cela signifie que les prix augmentent, et donc une baisse des revenus des ménages, un appauvrissement de la population et une baisse du niveau de vie », a commenté l’économiste Igor Nikolaïev, de la société de conseil FBK Grant Thornton. « Pour l’économie, cela veut dire que les investissements diminuent encore plus, que les risques se renforcent pour les investisseurs, que la situation économique est instable et incertaine », a-t-il ajouté.
Sur le marché boursier, l’indice RTS de la Bourse de Moscou, libellé en dollars, a dévissé de 4,83%, soit un plongeon de 16% depuis le début de l’année.
Forte hausse des prix
Le pétrole représente avec le gaz plus de la moitié des revenus de l’Etat russe et sa chute intervient au moment où la Russie, également visée par des sanctions dues à la crise ukrainienne, espérait sortir de la récession qui l’a frappée en 2014. Le baril d’or noir est passé mercredi sous les 28 dollars, ce qui n’était plus arrivé depuis 12 ans. Il semble inexorablement se rapprocher des 25 dollars, soit la moitié du niveau sur lequel se sont fondées les autorités russes pour bâtir leur budget 2016 et leurs prévisions économiques.
Le Fonds monétaire international table sur une baisse d’1% du produit intérieur brut cette année après une chute de près de 4% l’an dernier. Le gouvernement a déjà reconnu qu’avec un pétrole aux niveaux actuels, l’économie devrait encore se contracter et que des coupes budgétaires seraient nécessaires. Il multiplie les réunions ces derniers jours pour trouver des sources d’économies et de revenus supplémentaires, tout en préservant les prestations sociales et l’aide aux secteurs les plus en difficulté (automobile, BTP, etc.).
Se voulant rassurante, la banque centrale, qui avait dû fin 2014 prendre des mesures en pleine nuit pour stopper l’effondrement du rouble, a assuré que la stabilité financière n’était pas menacée. La chute de la monnaie russe risque pourtant fort de l’empêcher d’abaisser, au cours de sa réunion du 29 janvier, ses taux de crédit actuellement à un niveau punitif pour l’activité.
AFP
Quand Poutine ironise sur Davos
Le président Vladimir Poutine, qui s’exprimait devant des entrepreneurs au moment même où le rouble tombait au plus bas, a ironisé sur la présence à cette occasion de la plupart des principaux responsables économiques malgré l’ouverture du forum économique de Davos en Suisse. « Il n’y a visiblement plus d’argent pour les billets » de transport, a-t-il déclaré, estimant qu’il fallait « rester travailler à la maison ».
La crise a été marquée par une forte hausse (près de 13%) des prix à la consommation en 2015 ayant entraîné un plongeon des revenus des ménages et de la consommation. Les marchés de l’automobile ou de l’immobilier se sont effondrés, comme les séjours à l’étranger, et les ventes de smartphones ont pour la première fois reculé.
Sévère, l’ex-président soviétique Mikhaïl Gorbatchev a dénoncé l’absence de « plan d’action » des autorités pour sortir de la crise économique. « Tout ce que l’on nous dit vise visiblement à nous calmer, mais peu d’efforts sont entrepris pour réaliser » ces promesses, a-t-il jugé, cité par l’agence de presse Ria-Novosti.