Le patron du géant industriel Siemens a vivement dénoncé vendredi les méthodes des investisseurs chinois qui prennent le contrôle d’entreprises en Allemagne, où l’inquiétude face aux appétits de Pékin ne cesse de croître.
« Les Chinois vont voir une entreprise, donnent des garanties sur l’emploi pour instaurer le calme. Puis, à un moment, ils fondent une nouvelle entreprise dans laquelle ils dissolvent l’entreprise originelle à laquelle on retire la recherche et le développement », explique Joe Kaeser au journal régional Augsburger Allgemeine. Il prédit que c’est ce qui attend le fabricant allemand de machines-outils et de robots Kuka, racheté en 2016 par le géant chinois de l’électroménager Midea pour quelque 4,6 milliards d’euros. Le patron de Kuka, Till Reuter, a d’ailleurs été poussé au départ à la fin de l’année. Joe Kaeser a expliqué que Siemens aurait voulu racheter Kuka, mais que le prix mis sur la table était trop élevé. Du coup, la direction de l’entreprise allemande s’est laissé charmer par le groupe venu de Chine. « Ils avaient la conviction qu’avec les Chinois, tout allait rester tel quel (…) certes on est toujours plus malin après coup, mais là on pouvait s’y attendre », martèle le PDG allemand.
Un décret qui amoidri les capacités de l’état
La reprise de Kuka avait été combattu, en vain, par le ministre de l’Economie d’alors Sigmar Gabriel, principal critique des méthodes offensives de groupes chinois. Cette semaine, le gouvernement d’Angela Merkel a renforcé son arsenal pour s’opposer aux investissements non européens qu’il estime stratégiques. Un décret adopté mercredi ramène ainsi à 10% du capital, contre 25% depuis 2004, le seuil permettant à Berlin de bloquer des acquisitions étrangères dans certaines entreprises. Parmi les secteurs concernés figureront la défense, les télécommunications, le gaz, l’électricité, l’eau et les médias.
Très internationalisée et abritant de petites et moyennes entreprises qui sont des fleurons technologiques, dont bon nombre doivent organiser la transmission de leur capital, l’Allemagne suscite de longue date l’intérêt d’investisseurs. Berlin et d’autres capitales européennes se sont inquiétées ces dernières années des visées de groupes chinois sur des aéroports, des ports ou des firmes technologiques européennes. Les Européens s’inquiètent aussi du vaste projet de « Nouvelles routes de la soie », un colossal plan d’investissements dans les infrastructures en Asie et en Europe. L’UE craint notamment l’influence grandissante de Pékin en Europe centrale et orientale.
AFP