Le chinois Jingye va finaliser le rachat du groupe de sidérurgie en faillite British Steel, mettant fin à dix mois de rebondissement et à une première tentative de reprise avortée, mais sans reprendre pour l’instant l’usine française d’Hayange.
L’opération devrait être finalisée le 9 mars, précise Jingye dans un communiqué mardi. Elle n’inclut pas les parts de British Steel dans Redcar Bulk Terminal, terminal de chargement britannique, ou dans British Steel France et son site d’Hayange, « le gouvernement français n’ayant pas encore rendu son avis ». Des médias britanniques avaient affirmé que Paris était réticent à ce qu’Hayange passe sous pavillon chinois.
Jingye précise avoir accepté la suggestion du liquidateur public britannique, avec l’accord de Londres, de conclure une « transaction par étapes, d’abord les actifs britanniques et néerlandais – la filiale FN Steel BV – puis les actifs français ». Ce rachat va « préserver 3 200 emplois qualifiés à Scunthorpe (la principale usine du groupe britannique), à Teesside et ailleurs », précise le chinois. L’emblématique sidérurgiste à l’histoire tourmentée employait au total 5 000 personnes, dont la majorité sur son site de Scunthorpe au nord de l’Angleterre, mais aussi à Hayange en Moselle.
Il souligne que la finalisation de cette prise de contrôle va « débloquer un investissement de 1,2 milliard de livres pour moderniser le site et améliorer son efficacité énergétique ». « Ces aciéries existent depuis 150 ans et nous sommes heureux de pouvoir collectivement offrir à British Steel un avenir prospère pour les années à venir », s’est félicité le directeur général de Jingye, Li Huiming. « Nous sommes toujours intéressés par le rachat d’Hayange (…) et espérons une décision positive des autorités françaises prochainement », ajoute-t-il.
Hayange : « le bouquet de la mariée »
Le montant de l’acquisition de British Steel n’a pas été divulgué. La presse britannique avait évoqué 50 à 70 millions de livres (58 à 81,2 millions d’euros).
Le numéro deux du secteur au Royaume-Uni, derrière Tata Steel, avait été acculé à la faillite en mai faute de liquidités suffisantes et après le refus du gouvernement d’intervenir. Confronté à une rude concurrence de l’acier chinois, British Steel avait aussi mis ses difficultés sur le compte des incertitudes relatives au Brexit, qui avaient plombé la demande en acier de ses clients européens.
Malgré plusieurs centaines de suppressions d’emplois envisagées, le projet de Jingye avait reçu l’assentiment des syndicats qui estimaient que l’alternative serait le démantèlement. En Moselle, on reste confiant : « La chance qu’on a, c’est que notre carnet de commandes est plein » avec « 40% de notre marché en interne, la SNCF et, heureusement, on gagne de l’argent…. On était le bouquet de la mariée » pour Jingye, a expliqué Djamal Hamdani, représentant CFDT, syndicat majoritaire sur le site qui emploie environ 450 personnes. Jingye s’était dit début février « très confiant » dans les perspectives d’Hayange et faisait miroiter des investissements de 60 millions d’euros sur cinq ans. Dans son plan de reprise, « 70% des bénéfices venaient d’Hayange d’ici à quatre ans, c’est plus qu’une envie de nous reprendre, c’est une nécessité ! », avance Grégory Zabot. Selon cet autre délégué CFDT, l’audience de reprise devant la chambre commerciale de Strasbourg est prévue le 13 mars.
Une source de Bercy a confié que « plusieurs offres ont été déposées » en plus de celle de Jingye pour Hayange, même si elles ne sont pas encore définitives, assurant qu’il n’y a « pas d’inquiétude à avoir sur le site et notamment ses salariés ». Selon plusieurs sources, Liberty House et Olympus Steel – société détenue par le fonds britannique Greybull Capital qui avait racheté British Steel en 2016 avant de jeter l’éponge trois ans plus tard, et qui possède l’aciérie Ascoval de Saint-Saulve (Nord) – font partie des prétendants, tout comme ArcelorMittal et Saarstahl. « Tout le monde se bat pour reprendre Hayange, qui sort de l’or en barre », conclut Nacim Bardi, délégué CGT de Saint-Saulve.
LQ/AFP