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L’acier chinois au banc des accusés


ArcelorMittal, le plus grand employeur privé du Luxembourg avec 4260 employés, souffre de la concurrence chinoise. (Photo : Archives LQ)

La concurrence entre la Chine et l’Europe sur le marché de l’acier fait rage depuis de nombreux mois. Questions-réponses pour comprendre la situation.

Le secteur sidérurgique européen est en proie depuis de nombreux mois à une concurrence chinoise exacerbée. Que ce soit au Luxembourg, en France, en Belgique ou encore au Royaume-Uni, ce secteur est constamment en baisse et de nombreux sites ont fermé en moins de vingt ans. Le coupable du manque de rendement de l’acier européen est tout trouvé : la production chinoise.

La production d’acier chinoise est accusée d’être responsable de la crise sidérurgique en Europe ainsi que d’autres parties du monde, alors même que le secteur n’est pas épargné en Chine. Quel est le rôle de Pékin? Quelles sont les réponses mises en place?

Quel est l’impact de la Chine sur le marché mondial de l’acier?

La Chine est de loin le plus gros producteur mondial d’acier, avec environ la moitié de la production mondiale. Alors que le pays s’est urbanisé ces dernières décennies, il en est aussi devenu le plus grand consommateur, contribuant ainsi à l’essor des prix. Maintenant que l’économie ralentit, la demande a chuté et les producteurs chinois se retrouvent avec des surcapacités se montant à plusieurs centaines de millions de tonnes par an. En conséquence, les prix mondiaux des exportations ont plongé, passant d’un plus haut jamais atteint de 1 113 dollars par tonne en juillet 2008 à seulement 321 dollars le mois dernier, selon le site steelbenchmarker.com.

La Chine pratique-t-elle un dumping sur le marché de l’acier?

L’Union européenne a lancé une enquête antidumping concernant l’acier chinois et des responsables politiques européens ont utilisé le mot de dumping pour décrire les exportations chinoises. Le dumping signifie soit qu’un pays exporte à un prix inférieur à celui facturé sur son marché domestique, soit qu’un produit est vendu à un prix inférieur à son coût de production. Les investigations en la matière sont complexes et souvent longues. Il peut être difficile de calculer les coûts de production et l’Europe les quantifie de manière différente si elle considère le pays comme ayant une «économie de marché». L’UE a accordé ce statut à la Russie, mais l’a refusé pour l’instant à la Chine. Les accusations de dumping peuvent servir de prétexte pour échapper aux réglementations du commerce international qui interdisent aux pays d’imposer unilatéralement des droits de douane à l’importation. Or le faible coût du travail en Chine signifie que le pays peut vendre de manière rentable à des prix bien inférieurs aux groupes européens. Les responsables chinois soutiennent que la surcapacité de leur secteur sidérurgique est le résultat des changements économiques dans leur pays et qu’ils s’efforcent de la réduire.

Que font les autorités européennes et chinoises?

L’UE a imposé en février des droits de douane variant de 9,2 % à 13 % sur les importations de barres en acier utilisées dans la construction en provenance de Chine. Mais les industriels ont appelé à des droits beaucoup plus élevés, dans la lignée de la taxe de 266 % récemment décidée par les États-Unis. De son côté, la Chine a indiqué vendredi dernier qu’elle imposerait des taxes pouvant aller jusqu’à 46 % sur certains aciers laminés provenant de l’Union européenne. Cependant, les importations chinoises d’acier européen sont minimes. Pékin a par ailleurs également promis de réduire ses capacités de 100 millions à 150 millions de tonnes – sur un total de 1,2 milliard de tonnes – d’ici 2020, affirmant que cela entraînera la suppression de 500 000 emplois.

Où va l’acier chinois?

L’acier chinois est en très grande majorité vendu sur place. Selon l’Association mondiale de l’acier, les exportations vont d’abord à l’Asie avec environ 51 millions de tonnes sur les quelque 80 millions exportées en 2014. Suivent l’Amérique latine et le Moyen-Orient où sont exportés 20 millions de tonnes. La même année, la Chine a exporté plus de 6 millions de tonnes vers l’Union européenne et environ la même quantité en Afrique.

D’où vient l’acier de l’Union européenne?

Les importations européennes viennent pour la plupart d’autres pays de l’Union, à hauteur de quelque 101 millions de tonnes sur les 134 millions importées en 2014, selon l’Association mondiale de l’acier. Environ 18 millions de tonnes venaient cette même année des anciens pays de l’Union soviétique et d’autres pays européens n’appartenant pas à l’UE.

Le Quotidien/AFP