Les ministres des Finances de la zone euro étaient réunis lundi à Bruxelles, pour discuter de la poursuite de l’aide financière à Athènes et d’un allègement éventuel de sa dette, quelques heures après l’adoption de réformes controversées en Grèce.
Pour la première fois depuis l’adoption du plan d’aide de l’été 2015, la question de l’allègement de l’abyssale dette du pays (environ 180% du PIB) figure au programme de cette réunion extraordinaire des 19 ministres des Finances, convoquée à 13h00. «Ce jour est très important puisque que pour la première fois la question de la dette est à l’agenda d’une réunion de l’Eurogroupe», a déclaré le Premier ministre grec Alexis Tsipras sur twitter. «L’allègement de la dette va créer un climat totalement nouveau pour l’économie grecque. Cela va donner de l’oxygène aux finances du pays», a-t-il ajouté.
Le débat promet d’être houleux entre Européens mais c’est un motif de satisfaction pour Athènes qui le réclamait ardemment et a reçu sur ce point le soutien du Fonds monétaire international (FMI). Sur l’avancement des réformes exigées en contrepartie du troisième plan prévoyant l’octroi de prêts d’un montant total de 86 milliards d’euros, le gouvernement de gauche d’Alexis Tspiras, et son ministre des Finances Euclide Tsakalotos, ont souhaité aussi arriver en position de force à l’Eurogroupe.
A l’issue de deux jours de débats, les députés grecs ont adopté dans la nuit à une courte majorité la loi refondant le système des retraites, qui a encore mobilisé contre elle 26 000 personnes dimanche dans les rues d’Athènes et Thessalonique. Alors que les discussions avec les créanciers piétinent depuis dix mois, ce vote prouve que côté grec «nous avons tenu nos engagements», a assuré lundi la porte-parole du gouvernement, Olga Gerovassili, à la radio grecque Alpha.
Une position partagée par le ministre français des Finances, Michel Sapin: «Les Grecs ont fait tous les efforts que nous leur avons demandés de faire et nul ne peut mettre en doute à la fois la sincérité et la capacité de ce gouvernement à mettre en oeuvre des réformes», a-t-il dit. Alors que les créanciers sont unanimes pour dire qu’il n’est pas question d’une réduction nette du montant de la dette ou «haircut», leurs discussions devraient porter sur les autres options d’allègement, telles que l’allongement des échéances, des taux d’intérêt plus faibles, etc.
« La Grèce a tourné la page, enfin ! »
La position du ministre allemand des Finances, le conservateur Wolfgang Schäuble, est une des plus attendues, alors que Sigmar Gabriel, vice-chancelier, principale figure social-démocrate de la coalition au pouvoir à Berlin, a déjà souhaité une certaine souplesse à l’égard d’Athènes. «Un pas doit être enfin fait pour que la Grèce ne doive pas chaque année quémander, pour recevoir de nouveaux prêts. (…) Quelque chose doit être fait, pour réduire le poids de la dette», a déclaré lundi Sigmar Gabriel.
La Grèce a besoin d’un accord de la zone euro pour que de nouveaux fonds puissent être débloqués. Le pays a reçu à ce jour 21,4 milliards d’euros, et doit faire face à une échéance de remboursement de près de 2,2 milliards à la Banque centrale européenne (BCE) le 20 juillet. Une série de mesures d’économies supplémentaires pourraient être réclamées à Athènes en cas de non respect de l’objectif des 3,5% d’excédent primaire en 2018, un point qui figure aussi au menu des débats de l’Eurogroupe.
Le FMI considère que cet objectif est intenable et signifierait davantage d’austérité. La solution envisagée de nouvelles coupes budgétaires automatiques si la cible des 3,5% n’était pas atteinte n’est «pas très crédible», ni même «souhaitable», a écrit sa directrice générale, Christine Lagarde, dans une lettre aux 19 ministres. Samedi, Euclide Tsakalatos a mis en garde ses 18 homologues ministres de la zone euro contre «une nouvelle crise grecque», dans un autre courrier dont l’AFP a obtenu copie.
Il a exhorté l’Eurogroupe à donner son feu vert aux réformes engagées, «ce qui aiderait le pays (à retrouver) la confiance des investisseurs et la reprise» et signalerait que «la Grèce a tourné la page et que le pays n’est plus à risque, enfin !».
Le Quotidien/AFP