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La NASA ouvre ses portes au Luxembourg


Le couple grand-ducal héritier et le ministre de l'Économie ont découvert une entité de l'agence spatiale. (photos Sip/Jean-Christophe Verhaegen)

Une délégation luxembourgeoise a passé la journée de mercredi dans un centre de recherche de la NASA, à Moffett Field, en Californie, au cœur de la Silicon Valley.

Rien que le nom et le logo de l’agence spatiale américaine font rêver. Dès l’entrée, la sécurité est de rigueur sans pour autant être pesante. Badge obligatoire et signature d’un document laissant la possibilité à la NASA de restreindre toute curiosité excessive.

En traversant le centre de recherche, escortés par la police du centre, on remarque que le site est construit à la manière d’une caserne militaire : série d’immeubles identiques et bureau de poste spécifique au centre. Parmi les bâtiments rectangulaires, des bâtiments plus étranges apparaissent au fur et à mesure que l’on s’enfonce dans le centre, comme ce bâtiment difforme abritant un complexe dédié à l’aérodynamique.

Première étape, le «SimLabs», un département entièrement consacré à la simulation aérienne, de la gestion du trafic à la simulation d’un design d’avion en passant par la cartographie d’un environnement comme celui de la surface de la planète Mars via les photographies prises par le rover Curiosity en 2011.

Pour la petite démonstration, la délégation a testé le FutureFlight Central (FFC), qui permet une immersion visuelle à 360 degrés. Le guide d’un jour explique : «On peut recréer n’importe quel aéroport sur ces écrans et avoir l’impression d’être au cœur de la tour de contrôle.» Bluffant. L’objectif de ce simulateur est de pouvoir repenser la disposition des infrastructures d’un aéroport afin d’assurer la sécurité des personnes tout en améliorant la fluidité du trafic aérien, ce qui sous-entend une efficacité économique.

Le Luxembourg aura son HPC

Un peu plus loin, on découvre une salle contenant 128 écrans qui forment un mur interactif de 250 millions de pixels, l’ «Hyperwall». Ce mur sert notamment à visualiser les mouvements océaniques de la Terre, considérés comme un système interdépendant de la planète et ayant un impact sur une bonne partie de la population. Ce qui se cache derrière l’Hyperwall et le SimLabs, ainsi que derrière une série d’autres simulateurs, c’est un superordinateur HPC du nom de Pleiades. Le paradis pour un geek. Pleiades est une machine formée de plus de 246 000 processeurs et a une puissance équivalente à celle de près de 600 000 MacBook Pro.

Ce superordinateur est le sixième plus puissant sur le sol américain et le 22e au niveau mondial. Concrètement, Pleiades est une pièce où des armoires remplies de processeurs tournent constamment, un peu à l’image d’un datacenter. Étonnamment, Pleiades ne paraît pas surprotégé et l’accès entre les armoires de processeurs est libre à l’occasion de cette visite de la délégation luxembourgeoise, sous l’œil du guide.

Fin mars, Étienne Schneider a annoncé l’installation d’un HPC au Grand-Duché d’ici 2018, en collaboration avec six autres pays membres de l’Union européenne (Allemagne, Espagne, France, Italie, Pays-Bas et Portugal).

Ce superordinateur sera la 120e machine la plus puissante au monde. «Cet HPC servira aux entreprises ayant des besoins de calcul, mais également à l’initiative SpaceResources, dans la mesure où cette nouvelle infrastructure va contribuer, au même titre que les datacenters, à attirer des entreprises technologiques ayant besoin de telles ressources», a souligné le ministre de l’Économie après la visite des installations du centre de recherche de la NASA.

Le ministre a rappelé que l’enveloppe du projet européen est de 5 milliards d’euros, à laquelle le Luxembourg participe à hauteur de 50 millions d’euros. Pour aider ce projet à se réaliser, Étienne Schneider a d’ailleurs déjà noué des contacts avec le centre Ames de la NASA afin d’obtenir ses précieux conseils.

Jeremy Zabatta, envoyé spécial en Californie

Un fonds et une agence

Étienne Schneider a donné des précisions sur son projet de voir le Luxembourg se doter d’une agence spatiale… pas comme les autres.

Étienne Schneider se dit confiant pour la pérennité de son projet.

Étienne Schneider se dit confiant pour la pérennité de son projet.

À San Francisco, mercredi en fin de journée, après avoir participé à un groupe de discussion sur le développement des nouveaux marchés et des opportunités concernant le secteur de l’espace, le ministre de l’Économie a annoncé qu’une agence spatiale luxembourgeoise allait voir le jour avant les prochaines élections législatives. «Mon souhait est de pouvoir cadenasser le projet, de le mettre sur de bons rails afin qu’il perdure après les élections.»

Certains y verront l’aveu ou la peur de ne pas retrouver une place au gouvernement après les prochaines échéances électorales, mais il n’en est rien. Il faut plutôt y percevoir la volonté de mettre en place une structure viable qui puisse avoir un avenir. Pourtant, «le chef de file du CSV avait proposé de me prendre un ticket sans retour pour Mars, lors du début de l’initiative luxembourgeoise», plaisante le ministre, avant de préciser être confiant pour la pérennité de son projet, même si, malgré tout, le gouvernement devait changer de couleur politique.

Une agence spatiale de conseil

Pour la rendre plus concrète, le ministre dessine le contour de cette agence spatiale luxembourgeoise, qui sera bien différente des autres agences existantes, puisque ce sera un fonds d’investissement qui financera l’agence et non l’État.

«En discutant avec Jean-Jacques Dordain, ancien directeur de l’Agence spatiale européenne, et Peter Worden, ancien directeur de la NASA, ils m’ont dit tous deux que s’il fallait recréer une agence spatiale, elle serait complètement différente de la NASA et de l’ESA», a expliqué le ministre de l’Économie. En effet, les deux agences spatiales fonctionnent grâce à un budget qui se chiffre en milliards d’euros ou de dollars, pour des résultats ou des projets qui parfois semblent futiles. L’agence luxembourgeoise, selon la volonté du ministre, ne sera pas tournée vers le financement de projets aux budgets exorbitants, mais plutôt vers le soutien ou encore le conseil envers des entreprises privées spécialisées dans le secteur spatial.

Généralement, les personnes à la tête d’une telle agence ont été astronautes, mais faute d’astronaute luxembourgeois, Étienne Schneider est resté vague en précisant «vouloir faire appel à des spécialistes et des experts pour mener à bien cette agence spatiale luxembourgeoise».