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La cristallerie Baccarat reprise par un fonds chinois : « J’ai acheté un trésor vivant »


Désormais trois femmes sont à la tête de Baccarat : de gauche à droite, Anna Wang, vice-présidente de FFC, mère de Coco Chu; Daniela Riccardi, directrice générale de Baccarat; Coco Chu, PDG de FFC. (photo DR)

Un fonds d’investissement chinois, Fortune Fountain Capital, se porte acquéreur de la cristallerie de Baccarat pour 164 millions d’euros. Rencontre avec sa PDG, la très francophile Coco Chu.

Le nouveau patron de Baccarat est une jeune femme d’une trentaine d’années, chinoise. Vendredi pendant plus d’une heure, dans la salle de bal d’Anna-de-Noailles, avec ses décors de lambris et ses fresques, au cœur de la Cristal Room Baccarat à Paris, Mme Chu, qui se fait appeler Coco en hommage à Chanel, a expliqué les raisons de son intérêt pour la manufacture lorraine.

La société d’investissement chinoise Fortune Fountain Capital (FFC), dont elle est la PDG, a fait une offre irrévocable d’un montant de 164 M€ pour acquérir la cristallerie, jusqu’alors propriété de Starwood Capital, un fonds américain.

Petite robe noire Chanel, escarpins de soie turquoise, ornés d’une broche bijou, Coco Chu est venue spécialement de Chine avec son équipe pour présenter les raisons de son acquisition. A ses côtés, Daniela Riccardi, directrice générale, et qui le restera, est satisfaite.

Elle a proposé un plan de développement qui a été validé par FFC. Cela devrait se traduire à court terme par un investissement de 20 à 30 M€, et plus tard, de 50 M€. « Baccarat, c’est une belle endormie, nous allons la réveiller, ramener à la vie cette beauté », explique Coco Chu.

250 ans d’histoire

« Baccarat est un trésor vivant, riche de 250 années d’histoire. C’est l’archétype de la beauté et du raffinement de l’art de vivre. Pour nous qui sommes attachés à la notion du patrimoine, c’est quelque chose d’irremplaçable et d’inimitable. »

Consciente de l’inquiétude que suscite, à Baccarat et en Lorraine, l’arrivée d’un actionnaire étranger dans cette entreprise de patrimoine, Mme Chu veut rassurer. « Délocaliser de la production, c’est absolument impossible, à moins que Dieu ne me rappelle à lui ! Le savoir-faire de Baccarat ne s’acquiert pas dans les livres, c’est son ADN, c’est son sang. Ce qui est fait à Baccarat par des gens de Baccarat continuera à y être produit. Si Baccarat allait ailleurs, ça ne serait plus Baccarat. »

Elle confie aussi garder à l’esprit l’image d’une jeune verrière « en train de faire quelque chose de très compliqué, très sophistiqué. Cette artiste était tatouée : pour moi, c’est l’image parfaite de l’alliance de la modernité et de la tradition d’excellence de Baccarat », s’exclame-t-elle.

Chinoise francophile

Très francophile, amoureuse de la culture française, connue dans le secteur du luxe, Coco a connu Baccarat comme cliente, avant d’en devenir investisseur. « J’ai toujours été fan. Chez moi, tous les verres sont en cristal de Baccarat, et les lustres aussi. Et j’ai également des commandes spéciales et des gobelets de toutes les couleurs. »

Très rapidement, Coco Chu viendra en Lorraine, pour se présenter. Une façon de dire que l’opération financière qui est lancée a aussi du sens pour elle. Pour la manufacture, la holding FFC est un partenaire stratégique qui pourra lui permettre de s’installer sur les marchés asiatique et moyen-oriental du luxe. FFC a des clients richissimes à qui il propose des produits et services financiers haut de gamme personnalisés et dispose de réseaux d’influence puissants.

La force de frappe de FFC, c’est aussi la possibilité de densifier son circuit de distribution, dans des secteurs géographiques où la marque est peu connue car elle n’y a pas de point de vente. Or les ventes sont liées à l’existence des boutiques !

Monique Raux (Le Républicain lorrain)