L’homme le plus riche du monde, Jeff Bezos, patron d’Amazon et de la société spatiale Blue Origin, a annoncé jeudi à Washington qu’il entendait participer à la nouvelle conquête de la Lune, en présentant un projet d’alunisseur pour y transporter véhicules et équipements en 2024.
Blue Origin, compagnie spatiale de 2 000 salariés financée par le milliardaire depuis sa création en 2000, entre ainsi dans la compétition avec des sociétés établies qui rivalisent pour décrocher des contrats avec la Nasa pour le retour d’astronautes sur la Lune dans cinq ans. « Voici Blue Moon », a déclaré Jeff Bezos lors d’une présentation.
Derrière lui, des rideaux ont dévoilé une maquette de grand atterrisseur, pesant plus de trois tonnes à vide et 15 tonnes avec le plein de carburant, équipé d’un unique moteur. Il pourra transporter 3,6 tonnes de fret sur la surface lunaire, et 6,5 tonnes dans une version plus grande. L’alunisseur, posé sur quatre jambes, a un pont supérieur où pourront être fixés des équipements. Un grand réservoir sphérique de carburant (de l’hydrogène liquéfié) occupe son cœur. « C’est un véhicule incroyable, et il ira sur la Lune », a déclaré Jeff Bezos.
L’alunisseur est développé depuis trois ans, a-t-il dit. Il pourra emmener des instruments scientifiques, quatre petits rovers, mais aussi un futur véhicule pressurisé pour humains, selon lui. Il ne pourra pas lui-même embarquer des astronautes, mais serait suffisamment grand pour accueillir sur son pont un véhicule « d’ascension », c’est-à-dire un petit vaisseau, construit par d’autres, permettant aux astronautes de remonter de la surface vers une station en orbite.
Le but est d’atterrir au pôle sud de la Lune, où se trouve de l’eau glacée. L’eau peut être exploitée pour produire de l’hydrogène, qui servirait ensuite de carburant explorer le système solaire. D’après un document diffusé ensuite par Blue Origin, l’objectif du premier alunissage est 2024, c’est-à-dire la date fixée il y a moins de deux mois par le gouvernement de Donald Trump pour le retour d’astronautes sur la Lune, dont la première femme. Le patron n’a pas dialogué avec les journalistes.
« Une route de l’espace »
« Nous pouvons aider à tenir ce délai, mais seulement parce que nous avons commencé il y a trois ans », a déclaré Jeff Bezos. « Il est temps de retourner sur la Lune, mais cette fois pour y rester ». L’objectif de 2024, annoncé par le vice-président Mike Pence fin mars, a plongé la Nasa dans une frénésie d’activité, car cette mission était initialement prévue pour 2028. Rien n’est prêt : ni la puissante fusée (SLS) qui doit transporter les véhicules et astronautes. Ni les éléments de la future mini-station en orbite lunaire qui servira de point-relais. Ni l’alunisseur ou les rovers dont auront besoin les astronautes.
L’agence spatiale américaine est en train de finaliser les appels d’offre pour l’alunisseur. Lockheed Martin a présenté il y a plusieurs mois son projet, capable, lui, d’emmener des passagers. Quant à SpaceX, la firme rivale fondée par Elon Musk, elle se concentre sur d’autres chantiers : une capsule pour la Nasa pour relier la Station spatiale internationale à la Terre, et une grande fusée censée emmener des clients autour de la Lune en 2023.
« Nous allons construire une route de l’espace », a affirmé Jeff Bezos. Il a confirmé que la grosse fusée de Blue Origin, la New Glenn, serait prête en 2021. Elle offrira « une réduction radicale des coûts de lancement », a-t-il promis. L’autre projet de Blue Origin est la petite fusée New Shepard, destinée à des voyages touristiques d’une dizaine de minutes juste au-dessus de la frontière de l’espace (100 km d’altitude). Cette fusée, qui a réussi onze tests à vide depuis le Texas, emmènera des humains pour la première fois cette année, a-t-il assuré.
LQ/AFP