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Hausse du prix des carburants : une mesure symbolique pour le climat


Malgré cette hausse, les tarifs luxembourgeois resteront plus bas qu'en France et en Allemagne. (illustration Isabella Finzi)

En annonçant une hausse des taxes sur les carburants en 2020 lundi, le Luxembourg veut faire un premier pas pour le climat et atteindre ses objectifs en matière de réduction de CO2.

Pareille mesure en France a fait naître le mouvement des «gilets jaunes». Au Luxembourg, l’annonce d’une hausse du prix des carburants s’est faite en douceur et en nuance. Pour rappel, dans l’Hexagone, sur un an, le litre de diesel a augmenté de 10 centimes et de 17 centimes pour l’essence. Dans le cas du Luxembourg, «s’il y a eu une récente augmentation des accises sur les carburants en mai dernier, auparavant la dernière augmentation du genre remonte à 2012», a insisté Pierre Gramegna.

Le but affiché par le gouvernement est de réduire les émissions de CO2 du pays, qui, selon le ministre des Finances, sont émises pour «deux tiers par les transports». Cette hausse des accises sur les carburants, qui devra encore «être affinée en début d’année prochaine», est surtout là pour tenter de réduire les volumes de ventes, qui sont en hausse.

En effet, l’évolution actuelle des ventes de carburant met à mal les objectifs du Luxembourg en matière de réduction de CO2 et d’efficacité énergétique à l’horizon 2020 dans le cadre des accords de Paris.

En mai dernier, le gouvernement avait déjà augmenté les accises sur le diesel (+0,02 euro par litre) et sur l’essence (+0,01 euro par litre) en assurant vouloir rester dans les clous face aux engagements du Luxembourg face à l’urgence climatique et surtout face à l’augmentation des volumes de vente de carburants.

Près d’un milliard de recettes annuelles

Chiffres à l’appui, Pierre Gramegna a souligné que la première hausse avait pu freiner la tendance à la hausse des volumes de vente de carburants observée depuis 2017. En effet, sur les sept derniers mois (de mai à novembre), les ventes ont légèrement reculé par rapport à la même période de 2018 (-1,1 % au total, +5,3 % pour l’essence, -2,5 % pour le diesel). Mais là encore, il est difficile de juger de l’impact de cette hausse, puisqu’il ne faut pas négliger les conséquences du dieselgate sur les ventes de voitures roulant au diesel et donc sur la consommation de ce carburant. De plus, le ministre est également conscient que les ventes de l’année 2019 se situeront au niveau le plus élevé depuis 2012.

Actuellement, les recettes de l’État liées aux accises sur les carburants se montent à 958 millions d’euros par an. Et une augmentation des accises serait également un bonus pour le gouvernement et son budget «prudent». Conscient qu’il s’agit d’un coût supplémentaire pour les particuliers, le ministre des Finances a également indiqué ne pas vouloir toucher aux frais de déplacement forfaitaires, comme cela était prévu dans l’accord de coalition.

Il faut également y voir un geste, presque symbolique, pour rendre le pays moins attractif dans ce secteur et réduire le tourisme à la pompe, même si, dans les faits, en y incluant cette hausse, les tarifs luxembourgeois resteront plus bas qu’en France et en Allemagne. En Belgique, seul le diesel pour les professionnels est déjà plus bas du fait d’une législation particulière (lire encadré).

L’impact sera négligeable même chez les professionnels, assure le ministre Claude Turmes : «Nous discutons avec les acteurs luxembourgeois de la logistique comme Arthur Welter pour voir comment nous pouvons les aider. Mais il faut savoir que les grands acteurs ont déjà des prix négociés sur leurs volumes de carburants. De plus, certains font des efforts sur leurs véhicules et vont se doter, comme c’est le cas chez Arthur Welter, de nouveaux camions avec de nouvelles technologies permettant de diminuer la consommation de carburants.»

Jeremy Zabatta

Le diesel belge déjà moins cher

En Belgique, les professionnels du transport bénéficient d’un système de remboursement des accises. Avec l’augmentation du 1er mai dernier et ce système particulier, le diesel y est déjà moins cher.

Mille litres y coûtent 352 euros, contre 355 euros au Luxembourg.

L’OGBL insatisfait

Pour le premier syndicat du pays, l’annonce d’une hausse des accises sur les carburants n’est pas vue d’un bon œil, même si le syndicat soutient les mesures pour le climat.

«Nous soutenons les mesures pour atteindre les objectifs climatiques du pays, mais nous attendons également des contreparties, car cette augmentation sera supportée par les ménages, explique Nora Back, la présidente de l’OGBL. Même si c’est 1 centime par-ci et 2 centimes par-là, au final, ce sont les ménages qui seront touchés. Nous avions fait des propositions au gouvernement dans l’espoir de trouver des compromis, mais pour le moment, nous ne voyons rien. C’est regrettable et nous ne sommes pas satisfaits de cette augmentation.»