Le syndicat souhaite obtenir des réponses claires et des garanties face à la volonté de Guardian Luxguard de fusionner les sites de production de Dudelange et Bascharage.
Après l’annonce d’un projet de fusion des sites de Guardian Luxguard de Dudelange et de Bascharage, le syndicat OGBL tire la sonnette d’alarme face à une direction sans réponses claires devant les inquiétudes des 450 salariés concernés.
À première vue, la situation semble assez simple. Les outils de production du site de Dudelange (notamment le four) sont en fin de vie et ceux de Bascharage, qui tournent actuellement à 100 % des capacités, arriveront au bout en 2023. Rassembler les deux sites en un seul fait sens. Seul problème, la direction n’a pas voulu en dire davantage aux délégations du personnel des deux sites et a semblé, aux dires de l’OGBL, «incapable de détailler une vision d’avenir», a assuré Alain Rolling, secrétaire central adjoint au sein de l’OGBL.
«Guardian est tout de même un acteur global, une très grande entreprise. Alors entendre qu’il n’y a pas encore de vision à long terme et que des décisions se prendront en temps utile… eh bien c’est maintenant le temps utile !», s’est agacé le syndicaliste. Ce dernier demande surtout une garantie de l’emploi pour les salariés des deux sites en plus d’un projet industriel concret lié à des investissements afin de pérenniser les outils de production.
Au niveau de l’investissement, les représentants du personnel tablent sur une enveloppe de 80 à 100 millions d’euros par site afin de remettre à jour les outils pour une dizaine d’années. Du côté de la direction, l’investissement n’est pas à l’ordre du jour. «Les directions des deux sites ont expliqué que tous les investissements, notamment pour un nouveau four, sont gelés jusqu’à nouvel ordre et les deux directions se laissent l’option pour un nouveau four à Dudelange ou à Bascharage fin 2021», a souligné Alain Rolling.
Sur le fond, rassembler les deux sites fait, encore une fois, sens dans la mesure où Guardian n’y produit pas la même chose. «On peut effectivement dire que nous sommes complémentaires avec Dudelange», a assuré Vincent Collin, président de la délégation du personnel de Bascharage. Pour autant, comme pour chaque fusion, il y aura des doublons et le syndicat souhaite en savoir davantage afin d’anticiper et trouver des solutions à une éventuelle casse sociale. «Les deux directions ne veulent rien dire et les décisions sont prises plus haut, en Amérique du Nord. Même si nous nous adressons tout en haut de l’entreprise, nous savons que nous ne serons pas entendus et encore moins reçus», soupire Alain Rolling qui juge «inacceptable» la façon de faire des décideurs.
La concurrence polonaise
L’incompréhension est totale d’autant plus que l’OGBL affirme que les sites luxembourgeois de Guardian sont rentables et qu’un investissement serait amorti sur une dizaine d’années. «Mais là encore, nous sommes devant des actionnaires qui veulent toucher des dividendes rapidement et qui regardent à court terme, alors que nous demandons une vision à long terme», s’indigne le syndicaliste.
Vincent Collin va plus loin en affirmant que les valeurs de l’entreprise se perdent : «En 1981, c’est au Luxembourg que Guardian s’est installé pour la première fois en Europe avant de s’étendre un peu partout. On parle d’un savoir-faire mais également de salariés fiers de travailler pour cette entreprise depuis une trentaine d’années. Auparavant, chaque site était indépendant et quand un site avait des difficultés il avait le soutien des autres. Aujourd’hui ce n’est plus le cas et l’on raisonne uniquement en termes de profit. C’est bien dommage et cela ne correspond plus aux valeurs de William Davidson (NDLR : l’industriel américain mort en 2009, qui a fait renaître Guardian de la faillite en 1957).»
Surtout, l’inquiétude des salariés se fait grandissante dans la mesure où Guardian est en train d’ouvrir une nouvelle usine en Pologne à proximité de Czestochowa où le groupe américain possède déjà un site de production. «Cette nouvelle usine, c’est l’équivalent de trois sites de production ici», s’inquiète Vincent Collin qui renchérit : «Depuis 2018, les ventes et achats de matières premières ont été supprimées ici pour aller en Pologne. Maintenant, ils inaugurent une nouvelle usine et ne parlent pas d’investissement au Luxembourg alors qu’il y a 800 camions par mois qui sortent de nos sites, preuve qu’il y a demande. De plus, avec la crise du Covid-19, nos effectifs se sont réduits de 40 unités alors que nous produisons davantage qu’avant la crise.»
Effectivement, au plus fort du confinement, Guardian a réduit la production et a mis des salariés au chômage partiel avec pour conséquence l’arrêt des contrats intérimaires et des contrats à durée déterminée.
Si la fusion est prévue pour le 6 août prochain, l’OGBL ne compte pas en rester là et fera tout son possible pour avoir des réponses et des garanties. Affaire à suivre.
Jeremy Zabatta