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Fusion avec Tata refusée : Thyssenkrupp attaque la Commission


Thyssenkrupp motive son action en justice en raison d'une décision qu'il juge "mauvaise et disproportionnée". (illustration AFP)

L’industriel allemand Thyssenkrupp a annoncé jeudi porter plainte contre le refus par la Commission européenne de son projet de fusion avec l’indien Tata dans l’acier, accentuant à travers cette procédure rare la pression sur des règles européennes de la concurrence jugées trop strictes.

« Nous déplorons la décision de la Commission européenne que nous considérons comme mauvaise et disproportionnée, et c’est pourquoi nous déposons plainte », auprès de la Cour de justice de l’Union européenne, explique Donatus Kaufmann, membre du conseil de surveillance du groupe, dans un communiqué.

La Commission avait interdit début juin ce mariage, disant craindre une réduction de la concurrence dans le secteur de l’acier. « La Commission défendra sa décision devant la Cour », a-t-elle commenté jeudi.

Les deux groupes, qui avaient déjà présenté plusieurs concessions pour réduire leur part de marché en Europe, avaient refusé de céder plus et enterré leur projet avant même ce refus officiel. « La situation est critique pour les fabricants d’acier. La situation de surcapacité et la forte pression des importations en provenance d’Asie créent un environnement dans lequel la coentreprise envisagée avec Tata Steel n’aurait pas nui à la concurrence », se défend deux mois plus tard Thyssenkrupp.

La Commission a perdu une fois

Le conglomérat allemand reprend à son compte des critiques formulées à plusieurs reprises à la fois par les grands groupes industriels et par les gouvernements français et allemand, en croisade contre le droit de la concurrence européen qu’ils jugent inadapté face à la déferlante des produits asiatiques à moindre prix. En janvier, Joe Kaeser, le patron de Siemens, voyant que le projet de fusion dans le rail avec le français Alstom était en passe de capoter, avait qualifié de « technocrates rétrogrades » les décideurs bruxellois chargés de veiller au respect de la libre concurrence.

Paris et Berlin ont publié en février un manifeste appelant à un assouplissement du droit de la concurrence en Europe, allant jusqu’à demander pour un État « la possibilité de discuter » les décisions de la Commission.

Il est peu commun qu’un véto de la Commission soit attaqué devant la justice européenne « tout simplement car il y a très peu de cas d’interdiction », a souligné Andrea Collart, de la société de conseil Avisa partners à Bruxelles. « Et quand une décision de la Commission est attaquée, il est très rare que la Cour donne raison aux parties. C’est arrivé une fois récemment, dans la fusion UPS/TNT, mais la Commission a perdu principalement sur un point de procédure », a-t-il rappelé. Le Tribunal de l’UE avait annulé en mars 2017, pour « vice de procédure », une décision de la Commission qui avait refusé en 2013 le rachat du néerlandais TNT Express par le géant américain de livraison de colis UPS. Cet arrêt a été confirmé en appel par la Cour de justice de l’UE en janvier 2019.

LQ/AFP