Les grands centres de données qui représentent désormais le cœur de l’informatique mondiale tournent de manière accélérée du fait de la crise du coronavirus, mais sont loin d’être en surchauffe, selon les indications recueillies auprès des grands du secteur.
« Dans les très grandes salles » qui hébergent les machines des grands opérateurs du « cloud » (informatique dématérialisée) et des grandes entreprises, « on voit une augmentation de la consommation d’électricité de 5 à 10% », explique Fabrice Coquio, le président d’Interxion France, l’un des grands opérateurs dans l’Hexagone qui gère des « fermes à serveurs » à Paris et Marseille.
Par ailleurs, les opérateurs télécoms, les grands acteurs du cloud et d’internet qui utilisent des centres de données Interxion pour s’interconnecter entre eux, ont augmenté leur infrastructure depuis le début de la crise du coronavirus, ajoute-t-il.
Ils ont ajouté de « 10 à 15% » de serveurs et équipements d’interconnexion pour faire face à la montée des échanges, selon M. Coquio.
Selon Sami Slim, directeur adjoint de l’hébergeur Telehouse France qui accueille notamment l’un des points nodaux de l’internet français, France IX, le trafic de données a bel et bien augmenté, « mais ce n’est pas un tsunami ».
« Sur France IX le trafic a augmenté de 15% en moyenne sur les deux dernières semaines », explique-t-il.
Et les demandes d’interconnexion directes entre grands acteurs du réseau ont multipliées « par 2,5 » dans les centres de données de Telehouse, explique-t-il.
« Nos clients demandent en quelque sorte à rajouter une voie sur les autoroutes de l’information » qui sont au cœur des échanges de données en France, explique-t-il.
Selon lui, l’activité des grands acteurs du cloud en particulier explose avec le confinement.
Croissance accélérée du cloud à prévoir
Ces géants de l’informatique dématérialisée, clients de Telehouse en particulier pour les connexions, « rapportent tous une augmentation vertigineuse de leurs services », explique-t-il, évoquant des multiplications « par trois, voire par neuf » de l’activité de certains clouds publics, où les machines sont mutualisées entre une multitude de clients.
Chez Equinix, un autre grand hébergeur mondial de « fermes à serveurs » qui possède plusieurs sites en Ile-de-France, le directeur général Régis Castagné est plus nuancé.
« D’une manière générale, je pense qu’on est à peu près stable » sur la consommation électrique, « car l’augmentation chez les acteurs du cloud est probablement contrebalancée par la baisse d’activité d’autres grands acteurs » des réseaux, comme toutes les plateformes liées au voyage et au tourisme, estime-t-il.
En tout cas, tous les hébergeurs de centres de données sont d’accord sur un point: la crise a montré la pertinence des organisations basées sur le cloud, notamment pour encaisser pics et chutes d’activité de l’infrastructure informatique.
Et tous de prédire que le grand mouvement de migration vers le cloud des entreprises va encore s’accélérer avec la crise, pour le plus grand bénéfice notamment de leurs installations, déjà en croissance accélérée.
« Les entreprises, de la PME au CAC40, qui hébergent de l’informatique dans nos centres de données, ont radicalement changé », affirme Sami Slim.
« Avant, elles me parlaient de mettre un peu de cloud dans leurs systèmes, maintenant elles me parlent de ‘cloud first’ « , cloud d’abord, déclare-t-il.
Quand à Régis Castagné, il prédit un nouvel élan au mouvement qui a conduit les grands opérateurs du cloud américain, comme Amazon Web Services et Microsoft, à installer des centres de données géants en France.
« Ce mouvement va s’accélérer » dans les mois et années à venir, estime-t-il.
AFP