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Fin de la récession aux États-Unis, la croissance s’invite à l’élection


Tous les américains ne vont pas en profiter de la même manière. Car les millions de chômeurs que compte encore le pays voient s'approcher la fin de leurs droits. (illustration AFP)

Les États-Unis dévoilent jeudi l’ampleur du rebond du PIB au troisième trimestre, après le plongeon historique du printemps provoqué par la pandémie de Covid-19.

Cette annonce devrait prendre une tournure inhabituellement politique à cinq jours de l’élection présidentielle : Donald Trump, qui brigue un second mandat face à Joe Biden et se présente comme le candidat le plus à même de redresser l’économie, a déjà assuré que la hausse serait importante.

La croissance devrait être supérieure à 30%, estiment les analystes. Elle pourrait même atteindre 37%, selon l’estimation publiée mercredi par l’antenne d’Atlanta de la Banque centrale américaine (Fed). Mais « ça n’a pas d’importance, sauf pour quelques publicités politiques. Le chiffre sera historique et largement dénué de sens, car il ne nous dira sans doute pas grand-chose sur l’avenir », a indiqué l’économiste Joel Naroff.

La première économie du monde a en effet chuté si fort au printemps, que, quelle que soit l’ampleur du rebond, il ne sera pas suffisant pour revenir au niveau de l’année dernière. L’économie américaine avait basculé dans la récession au deuxième trimestre, reculant de 31,4%, après la baisse de 5% du premier trimestre, en rythme annualisé.

« Cette récession a été de loin la plus importante (depuis la Seconde Guerre mondiale), mais elle pourrait aussi entrer dans les livres de records comme la plus courte récession de l’histoire américaine », avait récemment souligné l’un des vice-présidents de la Fed, Richard Clarida.

Croissance record

Pour retrouver son niveau d’avant la pandémie, la croissance américaine devrait atteindre 53,3%, selon David Wilcox, économiste au Peterson Institute for International Economics.

La croissance enregistrée entre juillet et septembre promet toutefois de battre, de loin, le précédent record, de 16,7% au premier trimestre 1950. « Comme il s’agira de la plus rapide jamais enregistrée, il est absolument certain qu’elle sera mise en avant comme une réalisation exceptionnelle » par les politiques, a averti David Wilcox mercredi lors d’une conférence virtuelle.

Donald Trump a ainsi promis un « gros PIB », dans un tweet posté dès mardi. Le président américain vante régulièrement sa capacité à relancer et faire prospérer l’économie, et mise beaucoup dessus pour remporter un second mandat à la Maison Blanche face à son concurrent démocrate Joe Biden. Il lui reproche également d’avoir été à l’origine d’un redressement économique lent, lorsqu’il était vice-président de Barack Obama, et que le pays tentait de se relever de la crise financière mondiale.

Mais ce rebond historique pourrait n’être qu’un écran de fumée, reflétant une hausse très temporaire de l’activité économique, et pas une reprise durable. En effet, a encore indiqué David Wilcox, « la reprise a fortement ralenti ces derniers mois. Et il est probable qu’il y ait eu peu ou pas de croissance de l’activité en septembre ».

« Bouée de sauvetage »

Et pour tenter de sauver la croissance du quatrième trimestre, les yeux se tournent vers la Maison Blanche et le Congrès, incapables jusque-là de se mettre d’accord pour adopter de nouvelles mesures permettant de soutenir les ménages et les entreprises américaines, malgré plus de trois mois de négociations.

Les « perspectives du quatrième trimestre se détériorent de jour en jour, sans bouée de sauvetage », avertit l’économiste Diane Swonk, de Grant Thornton. Car le généreux plan de relance de 2 200 milliards de dollars adopté au printemps, avait permis aux Américains de continuer à dépenser, soutenant l’économie après plusieurs semaines de confinement. Même l’emploi frémissait.

Mais les ménages les plus modestes ont désormais encaissé le chèque envoyé par le gouvernement. Quant aux millions de chômeurs que compte encore le pays, ils voient s’approcher la fin de leurs droits au chômage, et l’aide supplémentaire qui leur était offerte a expiré, remplacée par une aide d’un montant moindre, voire même simplement supprimée dans certains États.

Sans nouvelle aide, l’économie américaine pourrait plonger plus que prévu en 2020. Le Fonds monétaire international table, pour l’ensemble de l’année, sur une baisse de 4,3% du PIB par rapport à 2019, quand la Fed voit une baisse un peu moins importante, de 3,7%.

LQ/AFP