La Banque centrale européenne a dégainé jeudi son bazooka de politique monétaire : l’assouplissement quantitatif. Ce fameux « QE » va injecter au moins 1 140 milliards dans l’économie de la zone euro. Mais quels effets concrets aura ce programme sur votre argent ?
Dès l’annonce de la BCE jeudi, l’euro est tombé à son plus bas depuis 11 ans par rapport au dollar. (Photos : AFP)
> Pouvoir d’achat : un moindre mal
Racheter de la dette publique et d’autres actifs revient pour la BCE à faire tourner la planche à billets. L’argent frais injecté dans l’économie doit faire remonter les prix en zone euro, alors qu’ils ont diminué de 0,2% en décembre. Le chariot au supermarché pourrait donc se renchérir. Mais « les biens à la consommation ne devraient pas substantiellement remonter. On n’empêche plus l’Europe de sombrer dans la déflation qu’on ne fait augmenter les prix », tempère Christopher Dembik, économiste chez Saxo Banque.
Avec son programme, la BCE veut montrer aux ménages et aux entreprises sa détermination à éviter le cercle vicieux de la déflation et les inciter à continuer à consommer. A l’inverse, si les consommateurs anticipent la baisse des prix et reportent leurs achats, les entreprises taillent dans leur production et les salaires, freinant encore plus la consommation, et ainsi de suite.
Acheter massivement des dettes souveraines européennes fait également baisser l’euro. Mécaniquement, les biens importés, comme le cacao, ou avec des composants produits à l’étranger comme les voitures, téléviseurs et autres smartphones vont devenir plus chers. Le pétrole aussi, mais « vu la chute des cours ces derniers temps, l’effet à la pompe sera marginal », reprend Christopher Dembik.
> Voyager en Europe plutôt qu’en dehors
Dès l’annonce de la BCE jeudi, l’euro est d’ailleurs tombé à son plus bas depuis 11 ans par rapport au dollar. La baisse de la monnaie unique est « sensible et durable », face à toutes les devises étrangères, selon Christopher Dembik. Voyager hors de la zone euro va donc coûter plus cher aux Européens.
> Crédit immobiliers moins chers
Le « QE » produit une explosion de la demande de dette souveraine, ce qui diminue les taux d’emprunts des Etats, déjà à des plus bas historiques. Or, par exemple en France, le taux de la dette à 10 ans sert de base pour fixer les taux des crédits immobiliers proposés par les banques. Les conditions de financement pour acheter peuvent donc devenir très avantageuses. Ceux qui l’ont déjà fait peuvent aussi renégocier leur crédit en faisant jouer la concurrence entre les banques et les rachats de prêts.
> Modifier son assurance-vie
Le programme de la BCE est à double tranchant pour l’assurance-vie, composée de fonds euros et de fonds en unités de compte. Les fonds euros, privilégiés par les Français pour leur rendement garanti, investissent largement sur les obligations d’Etat, un placement sûr, mais dont le rendement est désormais extrêmement bas. Les fonds en unités de comptes, minoritaires, sont plus orientés vers les actions. Comme les obligations sont moins attractives, « tout le monde s’attend à ce que les investisseurs se rabattent sur les marchés actions lors des prochains mois », explique Philippe Crevel, président du Cercle de l’Epargne. Une bonne raison selon lui pour revoir son contrat d’assurance-vie.
> La Bourse plus volatile
Les liquidités de la BCE doivent encore doper les places mondiales, mais mieux vaut viser des investissements à moyen terme selon Christopher Dembik. « Le risque de faire tourner la planche à billets est d’alimenter des bulles spéculatives », rappelle-t-il, en pronostiquant un retour de bâton à long terme. « Il faut aussi avoir des nerfs », souligne Philippe Crevel. Lorsque l’argent coule à flots, les investisseurs sur-réagissent et la volatilité est de mise.
AFP
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