Entre Brexit et Covid-19, la Commission de surveillance du secteur financier a dû innover pour assurer sa mission : contribuer à la stabilité de la place dans l’intérêt public.
L’année 2020 du gendarme de la finance luxembourgeoise a incontestablement été marquée par le Brexit et la pandémie de Covid-19 : c’est ce qui ressort du rapport d’activité de la Commission de surveillance du secteur financier qui vient d’être publié.
Les experts y soulignent ainsi que la crise économique engendrée par la crise sanitaire n’a pour l’instant qu’un impact limité, grâce à l’intervention des pouvoirs politiques et des banques centrales, estiment-ils, mais aussi aux réformes instaurées après la crise financière de 2007-2008.
Et la CSSF, elle-même, n’a pas été épargnée : le confinement et les règles sanitaires strictes l’ont forcée à innover dans ses méthodes de travail afin d’assurer la surveillance des professionnels et des produits du secteur financier luxembourgeois.
«Notre mission de surveillance prudentielle ne peut s’interrompre, ne serait-ce qu’un seul jour», tranche le directeur général, Claude Marx. «Même si nous n’étions pas préparés à cette pandémie – personne ne l’était – notre plan de continuité, la digitalisation et la modernisation de l’organisation du travail sur lesquels nous travaillons depuis plusieurs années déjà nous ont permis d’assurer sans faille la continuité de nos services», précise-t-il, indiquant qu’au printemps 2020, lors du confinement, plus de 99% des agents de la CSSF ont travaillé hors des murs, voire au-delà des frontières luxembourgeoises pour certains.
Pour poursuivre l’accompagnement des 5 175 entités surveillées, de nouvelles procédures ont été imaginées : par exemple, les contrôles sur place, outil indispensable à la surveillance, ont continué à avoir lieu, mais en visioconférence.
Un secteur financier «responsable»
Selon la CSSF, les entités ont toutes déployé leurs plans de continuité avec succès et «aucun incident opérationnel majeur n’est à déplorer» : dans son rapport, elle affirme que grâce à l’octroi de nouveaux crédits (avec ou sans garantie partielle de l’État) et de moratoires, «les banques se sont montrées responsables et ont aidé à amortir le choc économique causé par la pandémie». Précisons qu’en juin 2020, les moratoires avaient atteint presque 3,7 milliards d’euros pour redescendre à 446 millions fin décembre.
Autre défi majeur de l’an passé : les équipes de la CSSF ont été fortement mobilisées aux côtés des entités concernées par le Brexit, avec pour horizon la fin de la période transitoire au 31 décembre 2020. L’accès des prestataires établis au Royaume-Uni au marché luxembourgeois a été encadré, l’équivalence du régime anglais dans le cadre du régime pays tiers MiFID II / MiFIR a été constaté, et un certain nombre de dossiers d’agrément reçus dans le cadre du Brexit ont été revus.
Enfin, le verdissement de la finance est plus que jamais d’actualité : la CSSF a suivi de près les développements au niveau européen, et notamment l’entrée en vigueur au 10 mars dernier du règlement communautaire sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers. «Nous avons adopté une approche de tolérance et de fermeté», explique Claude Marx. «Tolérance par rapport à certaines questions ouvertes attendant notamment une clarification de la part de la Commission européenne et fermeté par rapport à ceux qui ne se préparent pas et ne se mettent pas aux normes.»
La digitalisation du secteur financier, déjà en marche avant la crise sanitaire, a quant à elle été accélérée par la force des choses, puisque de nombreux employés ont dû travailler à distance de manière prolongée, mais le directeur général se veut rassurant : «La CSSF reste vigilante par rapport aux risques de cybercriminalité et aux risques posés par des modèles d’affaires d’entités qui ne se préparent pas suffisamment à l’ère digitale.»
Christelle Brucker
La CSSF en chiffres
– 938 collaborateurs, dont 46% de femmes
– 5 175 entités sous surveillance, dont 3 611 OPC, 433 émetteurs, 342 gestionnaires de fonds d’investissement, 322 réviseurs d’entreprises agréés et 128 banques
– Les entités surveillées représentent 50 000 emplois directs et 4 900 milliards d’euros d’actifs sous gestion
– 101 contrôles sur place en 2020 et 30 amendes d’ordre prononcées