La Commission européenne veut imposer un chargeur universel pour téléphones mobiles et autres petits appareils électroniques, au nom des droits des consommateurs et de l’environnement. Un projet de réglementation dévoilé jeudi qui suscite la farouche opposition du géant américain Apple.
La directive proposée par l’exécutif européen, qui devra être approuvée par les eurodéputés et les États membres, vise à harmoniser les ports de chargement pour les smartphones, tablettes, appareils photo, casques audio, enceintes et consoles de jeu portatives.
Ce projet avait été lancé dès 2009 par la Commission, et a fait l’objet en janvier 2020 d’une résolution du Parlement européen, mais il s’est jusqu’à présent heurté aux vives réticences de l’industrie – et ce bien que le nombre de types de chargeurs existants se soit fortement réduit au fil des ans. D’une trentaine en 2009, ils sont passés à trois : le connecteur Micro USB, qui a longtemps équipé la majorité des téléphones, l’USB-C, une connexion plus récente, et le Lightning utilisé par Apple.
L’UE veut désormais imposer le port USB-C à l’ensemble des appareils électroniques, ce qui permettrait d’utiliser indifféremment n’importe quel chargeur, tandis que l’harmonisation des technologies utilisées garantira la même rapidité de chargement — qui peut actuellement être bridée en cas d’utilisation avec un appareil d’une marque différente.
11 000 tonnes par an de chargeurs inutilisés
Logiquement, Bruxelles entend découpler la vente d’appareils électroniques et de chargeurs : « Une victoire pour les consommateurs et l’environnement (…) les Européens en ont assez des chargeurs incompatibles s’entassant dans leurs tiroirs », a déclaré la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, citée dans un communiqué. « Il est temps de mettre fin à ce serpent de mer », a ajouté le commissaire au Marché intérieur Thierry Breton lors d’une conférence de presse.
Apple, qui fait valoir que sa technologie Lightning équipe plus d’un milliard d’appareils à travers le globe, a aussitôt réitéré son opposition : « Cette réglementation étoufferait l’innovation au lieu de l’encourager et nuirait aux consommateurs en Europe et dans le monde », a réagi le groupe de Cupertino. La firme à la pomme, qui avait estimé l’an dernier qu’une telle législation générerait « un volume sans précédent de déchets électroniques » en rendant obsolètes une partie des chargeurs en circulation, s’alarme de la transition de 24 mois proposée, jugée précipitée, et du bouleversement de ses filières de recyclage actuelles.
La Commission rétorque que les consommateurs européens, qui dépensent environ 2,4 milliards d’euros par an pour des achats de chargeurs seuls, pourraient économiser au moins 250 millions d’euros annuellement, et que les déchets de chargeurs non utilisés, évalués à 11 000 tonnes par an, pourraient être réduits de presque 1 000 tonnes. Bruxelles assure également préserver l’innovation technologique – notamment sur les techniques de chargement sans fil, précisément exclues du projet de directive car elles sont considérées encore largement en développement sur un marché actuellement « peu fragmenté ».
LQ/AFP