La Chambre des salariés Luxembourg affirme que le CETA est un «danger pour les services sociaux» et déplore le manque d’arguments du gouvernement sur le sujet.
L’Union européenne doit valider le 18 octobre l’accord de libre-échange avec le Canada (CETA), avant une signature formelle avec le Premier ministre canadien, le 27 octobre à Bruxelles. Une version provisoire du CETA doit entrer en vigueur dès cette signature. Déjà très critique envers cet accord, la Chambre des salariés Luxembourg (CSL) a réitéré, hier, son opposition à son adoption, dans un long document diffusé à la presse. Jugeant qu’il «comporte de grands risques pour les normes sociales et environnementales européennes», la chambre professionnelle «estime qu’il est, à ce stade, prématuré de donner l’accord à ce traité, sans avoir les garanties et réponses nécessaires aux questions qui se posent».
«Le contenu exact des protocoles additionnels récemment décidés n’est pas connu et leur valeur juridique est incertaine», s’inquiète notamment la CSL. Un conseil européen des ministres tenu samedi dernier, à Bratislava, a donné son accord de principe au CETA sans pour autant dévoiler tous les détails d’un accord qui rencontre un vif rejet de la part de la société civile en Europe.
Le 2 juin dernier, la CSL avait livré une analyse du traité dans le contexte luxembourgeois dont «les conclusions sont alarmantes», écrit-elle. Ce qui chagrine notamment la CSL et l’ensemble des opposants à ce projet, est la possibilité pour des entreprises d’attaquer les États devant une juridiction arbitrale si ces derniers adoptent des législations susceptibles d’amputer les profits des investisseurs. «La principale crainte concerne la capacité de légiférer de manière souveraine de l’État luxembourgeois dans des domaines aussi importants que les services publics, sans craindre de devoir payer d’importants dédommagements à d’éventuels investisseurs canadiens», insiste la CSL.
Manifestation le samedi 8 octobre
Le 2 août dernier, le ministère des Affaires étrangères, en charge des négociations du dossier pour le Luxembourg, a essayé de rassurer la CSL en répondant à ses questions. En vain. «Malheureusement le ministère des Affaires étrangères n’a pas su balayer les inquiétudes de la CSL, ni répondre aux questions soulevées», poursuit la Chambre des salariés pour qui le gouvernement «n’apporte aucun argument convaincant».
Selon la CSL, les services publics et sociaux sont clairement menacés par un accord qui permettra aux entreprises d’attaquer le Luxembourg sur des lois ou des nouvelles législations d’intérêt général qu’il aura adoptées. Elle déplore que le Luxembourg, dans le domaine de ses services publics, n’ait «formulé qu’une seule réserve explicite qui concerne les services fournis par les pharmaciens», s’en remettant à l’UE pour tout le reste.
La CSL souligne encore la définition vague donnée par le CETA à la notion d’investisseurs. Elle s’interroge sur l’utilité de créer un «Investment Court System», ce fameux tribunal devant lequel les sociétés pourront se retourner contre les pays, alors que «tout le monde s’accorde pour dire que les États membres de l’UE et le Canada possèdent des systèmes judiciaires fiables».
La CSL marque son désaccord avec le CETA de façon générale. Plus particulièrement, elle reproche au gouvernement, au ministère des Affaires étrangères précisément, d’avoir mal négocié l’affaire pour le Luxembourg en matière de protection des services publics en se contentant «d’affirmer que cet impact est inexistant».
La CSL rejoint ainsi l’avis de la «Plateforme Stop TTIP» regroupant au Luxembourg des dizaines d’associations et d’ONG, l’ensemble des syndicats ou encore des associations de protection des consommateurs. Samedi prochain, 8 octobre, cette organisation appelle à une manifestation au centre de Luxembourg pour s’opposer à l’entrée en vigueur du CETA dans les toutes prochaines semaines.
Le Quotidien