La start-up luxembourgeoise CarPay-Diem est en train de se préparer à une fin d’année avec ambition et pourrait devenir le prochain «champion» national.
Actuellement, se rendre dans une station-service n’est pas des plus confortable. Obligation de porter un masque, gel hydroalcoolique à l’odeur parfois nauséabonde et parcours fléché, l’expérience client n’est pas idéale. Dès lors, on aurait pu croire qu’une application luxembourgeoise permettant de payer son carburant depuis son smartphone et à l’intérieur de sa voiture fasse fureur en cette triste période. «Nous avons choisi de ne pas trop mettre l’accent sur cela. Nous avons communiqué assez tardivement sur le fait que notre solution peut servir à cela, mais ce n’est pas notre objectif», assure Alain Tayenne, cofondateur de CarPay-Diem.
Créée en 2016 au Luxembourg, la start-up CarPay-Diem a lancé en début d’année dernière en Belgique (et au début de cette année au Grand-Duché) sa solution de paiement mobile. L’idée est simple. Une fois le plein de carburant fait, l’automobiliste remonte dans son véhicule et règle la note de carburant avec son smartphone. «Aujourd’hui, au Benelux, nous sommes à 800 000 transactions et nous devrions arriver au million d’ici la fin de l’année. Nous sommes super contents dans la mesure où nous ne nous attendions pas à autant de volume aussi rapidement», apprécie Alain Tayenne.
Inutile de se précipiter sur son smartphone pour tenter de télécharger l’application. CarPay-Diem est une solution qu’il faut intégrer à une application déjà existante. En Belgique, cette solution est un service offert aux clients de la banque Belfius et aux clients des magasins Colruyt possédant la carte Xtra. Au Grand-Duché, seule la Banque internationale à Luxembourg (BIL) a noué un partenariat avec CarPay-Diem permettant aux 60 000 utilisateurs mobiles de la banque de profiter de cette solution digitale «made in Luxembourg». Au niveau des stations-services, la start-up luxembourgeoise a noué également plusieurs partenariats. Les clients de la BIL peuvent utiliser cette solution de paiement dans les enseignes Esso, Gulf, Lukoil et Texaco. En Belgique, il faut ajouter Dats24.
100 stations-services d’ici la fin de l’année
«L’enseigne Colruyt a partagé certaines données avec nous, comme le taux de récurrence qui est de 90%. C’est-à-dire que lorsqu’un utilisateur essaye notre solution de paiement, il revient et continue de l’utiliser devenant un utilisateur régulier», assure le cofondateur.
Au Grand-Duché, le lancement a été un peu plus difficile du fait de l’apparition du coronavirus et de la crise sanitaire qui en a découlé. « Au Luxembourg, nous avons eu en quelque sorte un faux départ dans la mesure où nous avons déployé la solution en fin d’année 2019. Le nombre de transactions a bien commencé, mais il a diminué avec le confinement. Pour le moment, c’est toujours les montagnes russes, mais ça se passe bien», souligne Alain Tayenne. Une période que les équipes de CarPay-Diem ont pu mettre à profit pour surveiller la fiabilité de leur technologie. «On reste très contents de notre année et de cette demi-année qui a été une période test d’un point de vue technologique. À ce niveau et à celui de la performance, ça se passe très bien. Tout comme au niveau de l’expérience utilisateur. Nous avons eu des retours de Colruyt, qui est très avancé en la matière, très bons. On sait que 95% des transactions se font en moins de trois secondes», s’enthousiasme Alain Tayenne.
Pour le moment, la solution CarPay-Diem est utilisable dans une cinquantaine de stations-services au Luxembourg et environ 400 stations-services en comptant la Belgique. «Nous sommes en discussion avec un grand acteur présent dans les deux pays et cela doublera notre réseau puisque l’on passera de 50 à 100 stations-services d’ici la fin de l’année au Luxembourg», confie Alain Tayenne. Ce dernier glisse également être en «discussion avec une autre banque du pays et espère pouvoir signer un partenariat avant la fin de l’année». Mais les acteurs bancaires ne sont pas la seule cible et CarPay-Diem recherche aussi à nouer des partenariats avec des acteurs non bancaires.
Au niveau plus global, Alain Tayenne laisse également entendre être en discussion avec un grand acteur autoroutier français : «D’ici la fin de l’année, l’on devrait être à 1 500 stations-services où l’on peut utiliser CarPay-Diem et on espère même atteindre les 2 000 en profitant d’une ou de deux opportunités toujours pour la fin d’année.»
Une start-up qui embauche
Après quatre années de vie, la start-up est donc entrée dans une phase de mutation et d’agrandissement. Pour autant, Alain Tayenne ne veut pas se risquer à qualifier CarPay-Diem de start-up, de scale-up ou encore d’entreprise. «On est un mélange entre une start-up, une scale-up et une entreprise. On veut garder cet esprit dynamique d’une start-up. On est une scale-up car nous sommes en production et nous générons des revenus en plus d’être dans une phase de développement intense au niveau commercial, mais on n’est pas encore pleinement une entreprise car on consomme encore du cash et c’est pour cela que nous avons fait une levée de fonds. Mais nous sommes quand même un peu une entreprise car nous avons une trésorerie solide qui nous garantit de quoi vivre plusieurs années. On génère un flux de revenus, on a bon flux de transactions et une bonne attraction commerciale», s’enthousiasme le cofondateur.
D’un point de vue financier, la start-up se porte bien. Récemment, CarPay-Diem a réussi une levée de fonds de 5 millions d’euros après avoir déjà réussi à lever 1,2 million d’euros en 2018. Modeste, Alain Tayenne ne s’attarde pas trop sur les montants et préfère mettre l’accent sur l’ancrage local de la société, notamment en termes d’emploi. «Nous sommes une société luxembourgeoise avec des employés résidents et des frontaliers. Nous étions quatre salariés à noël dernier. Aujourd’hui nous sommes quatorze et on sera quinze salariés à temps plein à la fin de l’année. Ce genre de bonnes nouvelles manque un peu actuellement, alors je suis assez content de le dire», lance Alain Tayenne.
Le prochain champion luxembourgeois
Quand on parle de start-up, on veut souvent trouver le «champion» national. Il se pourrait bien que CarPay-Diem soit le prochain. «On est présents dans trois pays, on sera bientôt dans quatre pays avec les Pays-Bas et cela fera de CarPay-Diem le seul acteur générique de paiement mobile en station-service au niveau européen qui est sur une belle trajectoire. Nous œuvrons pour être dans trois autres gros pays européens et nous travaillons aussi avec des constructeurs automobiles. On aimerait bien être le succès luxembourgeois dans le domaine», conclut Alain Tayenne.
Jeremy Zabatta