Accueil | Economie | Budget de l’UE : des erreurs mais peu de fraude

Budget de l’UE : des erreurs mais peu de fraude


Représentant du Luxembourg à la Cour des comptes européenne, Henri Grethen a détaillé hier matin les conclusions du rapport annuel sur l'exécution des fonds européens. (photo Hervé Montaigu)

La Cour des comptes européenne a rendu son rapport sur le budget 2014 de l’UE qui indique un niveau estimatif d’erreurs de 4,4 %. Sans les félicitations du jury.

Comme chaque année, Henri Grethen, membre luxembourgeois de la Cour des comptes de l’UE, présente le rapport qui conclut que les fonds pourraient être mieux utilisés si les erreurs passaient au moins sous la barre des2%.

Chaque année, Henri Grethen, membre luxembourgeois de la Cour des comptes de l’UE, précise ce qu’il faut comprendre par «niveau d’erreur» car, cette année encore, il se situe à 4,4 %, ce qui pousse la Cour a émettre un avis défavorable sur la légalité et la régularité des paiements effectués en 2014. «Il ne s’agit pas d’un indicateur de fraude, mais le niveau d’erreur estimatif reflète surtout des manquements aux règles financières de l’UE.»

Les cas de fraude présumée sont, eux, transmis à l’OLAF, l’Office de lutte anti-fraude de l’UE, et les auditeurs en ont constaté 22 en 2014, contre 14 l’année précédente, sur les 1 200 opérations évaluées. «Les cas les plus fréquents de fraude présumée concernaient la déclaration de coûts qui ne remplissaient pas les critères d’éligibilité, les conflits d’intérêts et autres irrégularités dans les marchés publics», renseigne le rapport.

Lire aussi : L’UE a gaspillé 6,3 milliards d’euros en 2014

 

Les erreurs se situent dans des paiements effectués et dont les montants n’ont pas été utilisés conformément aux textes en vigueur. « Des mesures correctrices, appliquées aussi bien par les États membres que par la Commission européenne, ont permis d’éviter un niveau d’erreur estimatif global qui aurait atteint les 5,5 % », précise Henri Grethen.

Les recettes sont, dans leur ensemble, légales et régulières et s’élèvent à 143,9 milliards d’euros. Henri Grethen rappelle que l’UE a procédé à des ajustements en 2014 concernant les contributions des États membres par apport à leur revenu national brut. « Cela a provoqué une panique en Grande-Bretagne, il y a quelques mois, quand David Cameron a appris que son pays devait verser 2,2 milliards supplémentaires. Je précise que le Luxembourg, lui, s’est fait rembourser quelque 60 millions pour la même période .» Les cycles de vérification peuvent couvrir de longues périodes donc leur impact se fait ressentir.

Marchés publics pas très nets

L’auditeur externe de l’UE a donc analysé en profondeur un échantillon de 1 200 opérations provenant de l’ensemble du budget de l’UE et c’est dans les locaux mêmes des bénéficiaires que se déroule l’audit. « Il s’agit d’un agriculteur, d’un institut de recherche, d’une entreprise après la passation d’un marché public », illustre Henri Grethen. Relevons qu’aucune opération luxembourgeoise n’a été analysée cette année.

Dans le domaine «Compétitivité pour la croissance et l’emploi» le niveau d’erreur atteint les 5,6 %. « Nous avons relevé des frais de personne calculés de manière incorrecte, des frais de voyage et d’équipement non justifiés », précise le membre luxembourgeois de la Cour des comptes. Les PME sont particulièrement exposées aux erreurs comme, par exemple, celle qui reçoit une aide à l’innovation qui n’a pas été attribuée selon les règles.

C’est au chapitre «Cohésion économique, sociale et territoriale» que ce niveau est le plus élevé, avec
5,7 %. « Nous avons réalisé un rapport spécial sur les marchés publics et nous avons proposé une suspension des paiements pour les États qui ne respectent pas les règles », rappelle Henri Grethen. Les infractions aux règles en matière de marchés publics représentent près de la moitié du niveau d’erreur estimatif.

L’auditeur luxembourgeois se montre beaucoup plus clément avec les agriculteurs qui, dans la catégorie «Ressources naturelles», participent au niveau d’erreur de 3,6 %. « Les erreurs les plus fréquentes sont des surdéclarations de surfaces agricoles ou des parcelles de terre inéligibles. Mais il faut se mettre à leur place, ils doivent compulser une centaine de pages de réglementation à respecter et une différence de 5 centimètres est déjà considérée comme une erreur par la Cour des comptes, alors ne vous montrez pas sévères avec eux, nous le sommes déjà suffisamment », plaide-t-il.

L’administration, elle, affiche un niveau d’erreur de 0,5 % seulement « mais des améliorations sont toujours possibles », note-t-il.

Toujours est-il que la Cour préconise toujours des réformes afin de donner un peu de souplesse au budget de l’UE en cas de crise. On l’a vu avec les réfugiés, il s’agit de pouvoir « gérer les pressions dans le domaine de l’asile, de la migration et de la sécurité », indique Henri Grethen.

Geneviève Montaigu