Qui l’eût cru ? Au centre Drosbach, à l’entrée de Luxembourg-Ville se trouve le data center de la société European Data Hub. Visite d’un endroit aussi surveillé que le lait sur le feu.
On n’entre pas facilement dans un data centre. Après avoir déposé ses papiers d’identité et obtenu son badge, on peut enfin commencer l’exploration. Avec l’enregistrement des personnes entrant dans le bâtiment, «on sait en permanence combien il y a de personnes dans le data centre», certifie Patrice Roy, directeur de la société European Data Hub.
Sa société compte une dizaine de personnes sur place. «C’est Johnson Controls qui opère le site», souligne Patrice Roy. Le data centre de Drosbach s’étend sur 15 000m 2. Il compte 5 500m 2 de salles informatiques souterraines réparties sur trois étages. Le directeur n’en fera visiter qu’un seul.
Une fois rentré dans le gigantesque ascenseur qui conduit vers différentes salles, le directeur explique que son data centre est certifié Tier IV. Dans l’échelle de classification, Tier I correspondrait à «une armoire Ikea» tandis que Tier IV, le grade le plus haut offre une disponibilité de 99,995 %. En clair, en cas de panne, il n’y aura pas de coupure de courant et les services continueront d’être assurés pour le client. Ce data center a tout en double. Il possède deux feeds (nommés A et B, respectivement rouge et bleu), c’est-à-dire deux lignes de production d’électricité et d’eau glacée. Ils alimentent en parallèle les systèmes informatiques installés dans les salles.
Grâce à cette redondance, «depuis 5 ans, nos clients n’ont pas perdu une seconde d’électricité», affirme le directeur d’European Data Hub.
«À 20 mètres sous le sol»
La première pièce visitée contient les batteries. En cas de panne, elles ont une autonomie de 20 minutes. Elles produisent 1 million de watts ce qui équivaut à la consommation de «500 maisons au Luxembourg». Une salle similaire se trouve à un autre endroit de l’étage. Après les batteries, voici les armoires. Les serveurs étant installés dans une salle fermée, il est impossible de faire sortir la chaleur qu’ils dégagent.
En fait, les armoires reçoivent l’air chaud venant des serveurs informatiques. Elle filtrent cet air pour ensuite «faire passer l’air chaud sur les tuyaux dans lesquels l’eau glacée circule et finalement pulser dans le faux plancher l’air frais qui ira à son tour refroidir les serveurs», détaille Patrice Roy. Ainsi, les serveurs restent à bonne température.
Une salle plus loin se trouve deux cuves de diesel. D’une contenance de 50 000 litres, elles servent à alimenter les générateurs.
«Les pompes amènent le fioul aux générateurs dans la salle des générateurs. Il y a aussi des cuves plus petites», certifie Patrice Roy. «Ici, nous sommes à 20 mètres en dessous du sol et le fioul a une température de 12°C» continue-t-il. Ainsi, la qualité du combustible est identique en été comme en hiver.
De l’eau de la ville refroidie sur place
Les générateurs alimentent les serveurs informatiques lorsque le réseau urbain est défaillant mais toujours à travers les batteries.
En cas d’incendie, que se passe-t-il ? Les bombonnes remplies d’Argonite, un gaz composé à moitié d’argon et de diazote, se vident en «20 secondes». Ce gaz d’extinction «suffit pour respirer» et pour évacuer les lieux le plus vite possible.
La visite continue avec la découverte des compresseurs. Il s’agit de réfrigérateurs qui refroidissent l’eau. «Sur le feed B, on a trois réseaux d’eau glacée» assure le directeur d’European Data Hub. «On perd de l’eau sur un tiers d’un feed d’un étage. Quatre systèmes de pompage fonctionnent en parallèle», signale Patrice Roy. Au pire des cas, le réseau d’eau explose. Heureusement, les salles informatiques ne sont pas touchées par l’eau qui coule.
Une micro-coupure d’électricité, peut avoir de «graves conséquences». S’entend pour le client l’interruption du service et pour l’entreprise, une perte d’argent. Au cas où un incident de ce genre se produirait, les générateurs monteraient en pleine puissance en 8 secondes.
Enfin, une dernière porte s’ouvre. Derrière, on découvre les serveurs protégés des regards extérieurs par une vitre. À travers, on peut voir les câbles rouges ou bleu. Ils portent tous une étiquette, de cette manière «on sait d’où il vient», conclut Patrice Roy.
Aude Forestier