Un millier d’ouvriers du sidérurgiste italien en difficulté ex-Ilva, racheté il y a un an par ArcelorMittal, a manifesté mardi à Rome pour protester contre le projet du géant mondial de supprimer quelque 4 700 emplois.
« Appliquer l’accord » de 2018, « Respect pour Tarente », clamaient les banderoles brandies par les salariés dont nombre avaient voyagé toute la nuit depuis cette ville des Pouilles (sud-est). S’étaient joints à eux des employés d’une usine Whirlpool proche de Naples et des syndicalistes des transports inquiets pour l’avenir de la compagnie aérienne Alitalia.
Le chef du puissant syndicat de centre-gauche CGIL, Maurizio Landini, a appelé l’indo-britannique Lakshmi Mittal à « revenir négocier sur la base de l’accord signé avec les syndicats » en 2018, lors du rachat de l’ex-Ilva. Le géant mondial a saisi la justice en novembre pour faire annuler ce rachat, mais récemment des discussions ont repris avec le gouvernement pour un maintien de sa présence.
L’État italien prêt à investir
Selon Rome, ArcelorMittal a proposé un nouveau plan industriel assorti d’environ 4 700 suppressions de postes, un plan jugé inacceptable par le gouvernement. Celui-ci a fait savoir ces derniers jours que l’État était disposé à investir pour relancer l’ex-Ilva. Selon la presse italienne, cette opération pourrait se faire via la Caisse des dépôts italienne et le groupe semi-public gazier SNAM. L’objectif serait de limiter à 1 800-2 000 le nombre de suppressions de postes, avec des incitations fiscales pour que d’autres entreprises réembauchent ensuite ces ex-salariés d’Ilva.
Les représentants syndicaux présents à la manifestation se sont tous montrés favorables à une possible entrée de l’État au capital, dans le cadre d’un projet de relance. Jugeant le secteur de l’acier « stratégique » pour l’Italie et ses nombreuses PME, Maurizio Landini a rappelé qu’il y avait « eu des interventions étatiques dans d’autres pays, en France, en Allemagne, et même aux États-Unis quand il s’est agi de sauver le secteur automobile ». Toutefois, a-t-il noté, l’État ne peut se substituer « aux investissements que les entrepreneurs privés doivent faire ». S’adressant à la famille Mittal, il lui a conseillé de « cesser de jouer avec la finance et d’investir vraiment en Italie ». Annamaria Furlan, du syndicat centriste CISL, a plaidé pour « des plans d’investissements bien ficelés qui donnent des perspectives d’avenir » et qui garantissent qu’il n’y ait « aucune suppression d’emplois », chez Ilva et Alitalia.
Malgré les déclarations du gouvernement, Paolo Fittipaldi, ouvrier de l’ex-Ilva, s’est dit très pessimiste. Pour lui, le gouvernement et le Premier ministre Giuseppe Conte « ne font que du bavardage ». « Une usine comme celle-ci ne peut pas être reconvertie en deux jours : il faut des années de programmation, ce qui n’a jamais été fait », a-t-il déploré.
LQ/AFP