Le Quotidien s’était déjà fait l’écho de la formidable aventure de Jean-Baptiste Ancelot, qui a visité tous les pays viticoles du globe. Désormais, un livre existe et il est très beau.
Les chiffres donnent le tournis. Entre 2014 et 2018, Jean-Baptiste Ancelot est passé par 88 pays, a visité 510 domaines et dégusté 5 406 vins! Un vrai tour de force qui permet surtout de nous ouvrir les yeux. La production de vin est véritablement mondiale et ne se limite pas à l’Europe ni au Nouveau Monde. La viticulture et la vinification sont portées partout, y compris dans des lieux où l’on imaginait qu’elles étaient impossibles. On produit des bouteilles sous le climat tropical de la Thaïlande, à plus de 2 700 mètres d’altitude en Colombie, dans la savane qui borde la vallée du Rift au Kenya et même en Norvège, au-delà du 60e parallèle ! Bien sûr, Jean-Baptiste Ancelot est aussi passé par le Luxembourg, c’était en décembre 2017. Dans sa longue liste, le Grand-Duché représentait le 56e pays traversé.
Le livre de Jean-Baptiste Ancelot n’a pourtant rien d’un catalogue. On comprend qu’avec lui le vin, finalement, n’est qu’un prétexte pour aller à la rencontre de ses semblables. S’il est indiscutablement un expert (sa formation universitaire l’a spécialisé dans le commerce international du vin, son expérience professionnelle l’a emmené de Hong Kong à New York en passant par la vallée du Rhône ou Zurich), ce n’est pas tant la technique autour du vin qui le passionne, que son âme. Une bonne bouteille naît de la connivence entre un cépage, un terroir et un vigneron. Et pour peu que s’additionne à cet attelage une belle rencontre, la partie est gagnée! L’idée de ce tour du monde, une première mondiale, était donc un coup de génie, que Jean-Baptiste Ancelot a eu la bonne idée de partager avec nous.
Son étape au Luxembourg
Jean-Baptiste Ancelot avait découvert pour la première fois la production luxembourgeoise lors d’un salon, où il avait dégusté et beaucoup apprécié les vins du domaine Alice-Hartmann. Il ne partait donc pas complètement dans l’inconnu, mais a tout de même avoué qu’il ne s’attendait pas à trouver ici une production aussi intéressante, tant pour les vins blancs que pour les crémants ou les vins rouges. Le globe-trotter a visité les domaines Mathis Bastian (Remich), Alice Hartmann (Wormeldange), Henri Ruppert (Schengen), Mme Aly-Duhr (Ahn) et Château Pauqué (Grevenmacher).
Dans Le Quotidien du 30 septembre 2017, il reconnaissait que «le Luxembourg est un acteur viticole très sérieux avec de très beaux vignobles». Dans le livre, il écrit : «On craque littéralement pour le charme de la région, ses itinéraires œnotouristiques bucoliques, la sympathie des vignerons et leurs cuvées authentiques. Des vins à prendre très au sérieux, avec une préférence pour les cépages riesling, auxerrois et pinot noir.»
Quelques étapes mémorables
Le 23 février 2019, alors que son périple venait de s’achever, Jean-Baptiste Ancelot ouvrait son carnet à souvenirs pour Le Quotidien.
• Dégustation épique en Slovénie :
La rencontre avec le vigneron Marjan Simcic a été un des grands moments de son voyage. «J’ai trouvé quelqu’un de plus mordu et de plus fou que moi!, s’amusait Jean-Baptiste Ancelot. La séance de dégustation a été hors du commun, j’ai craqué d’émotion tellement ce que je goûtais me transportait.» Les vins blancs à base du cépage Rebula sont une révélation pour lui, illustrant la nécessité de sauvegarder les cépages indigènes dans un monde où la mondialisation a tendance à tout uniformiser. «Je n’en peux plus du chardonnay qui pousse partout!», lance-t-il.
• Belle rencontre en Palestine :
Sari Khouri est vigneron et architecte, aussi gentil que pointu. «Il a lancé d’admirables recherches en Palestine pour identifier l’ADN de cépages très anciens qui n’avaient jusque-là jamais été référencés.» Il vinifie ses vins dans des amphores fabriquées sous son contrôle et maîtrise avec une précision extrême l’ensemble de sa production. «Il vit du côté de Bethléem, dans un environnement forcément très compliqué… Cela ne l’empêche pas d’offrir un accueil sublime, et cela touche encore un peu plus. Dans sa personne et dans ses vins, on retrouve les plus belles qualités.»
• Frayeur au Kenya :
Parfois, les domaines sont très fermés et il est pratiquement impossible d’y entrer. Jean-Baptiste Ancelot a bien failli repartir bredouille du Kenya : «La Leleshwa winery est perdue dans la savane et protégée par des gardes armés de fusils. On nous a fait attendre deux jours et demi avant de pouvoir entrer, l’atmosphère était vraiment très tendue.» Mais sa patience et sa force de persuasion ont permis de décanter la situation : «Finalement, lorsque les grilles se sont ouvertes, nous avons été formidablement accueillis par l’œnologue, Emma. Nous avons compris que le domaine avait passé ces deux jours et demi à éplucher les réseaux sociaux pour s’assurer de notre bienveillance !»
Erwan Nonet