Le festival de Villerupt donne rendez-vous à son public pour la 41e fois autour de la région de l’Émilie-Romagne, de Federico Fellini… et d’une actualité débordante.
Voilà une recette qui prouve régulièrement son succès – en témoignent les quelque 40 000 spectateurs qui se déplacent chaque année. Le festival de Villerupt se plaît toujours à jouer à l’équilibriste entre les époques, et cette 41e édition conserve les bonnes habitudes avec 70 films s’étalant de 1952 (pour le plus vieux d’entre eux, Don Camillo, qui fera l’ouverture) à nos jours.
Mieux encore : «Près de trois quarts des œuvres au programme sortent en même temps en Italie», soutient l’organisation, qui n’a plus à prouver son entêtement à «coller à l’actualité», pour ainsi aller à l’encontre des clichés – une mission de cœur.
Sorrentino et Berlusconi
En célébrant (après les Pouilles, Naples ou le Frioul) l’Émilie-Romagne, tout en remettant au goût du jour les classiques de Federico Fellini, le rendez-vous fait d’une pierre deux coups. Elle rappelle ainsi que la région est un important centre culturel et une terre «active» du 7eart transalpin, à travers ses régulières aides financières, la jolie renommée de la Cinémathèque de Bologne et les réalisateurs de renom qui y sont nés (Bellocchio, Bertolucci…). Douze films le soulignent, même si le festival a cherché à «éviter les évidences». Celle qu’elle ne peut pas contourner, toutefois, est que le plus célèbre représentant du cinéma italien vient du même coin, de Rimini plus précisément. Résumée en huit longs métrages, sa filmographie ne laisse toujours pas de marbre avec des œuvres aujourd’hui rangées au panthéon du 7e art (I vitelloni, La strada, Otto e mezzo, Amarcord…).
Mais le festival de Villerupt, à travers ses films en compétition (20) et ceux qui composent la sélection «Panorama» (30), souligne la nécessité de relayer l’actualité, aussi triste soit-elle. Et pour le coup, la traversée est dense, parfois éprouvante, témoin d’une Italie en plein marasme, à l’instar de l’Europe tout entière. Les thématiques ne manquent malheureusement pas : la crise migratoire (Fiore gemelo), le libéralisme à tout crin et ses conséquences sur l’économie (7 minuti – prix du public en 2017 –, I villani), les catastrophes écologiques (Il bene mio)…
L’infini détail…
Sans oublier, bien sûr, les affres de la mafia, pour ne pas perdre les réflexes (La terra dell’abbastanza) et d’autres sujets fédérateurs (homosexualité, famille divisée…). Finalement, seul le point le plus néfaste du moment, la montée des populismes, est abordé avec trop de légèreté (Sono tornato), et que l’aspect politique risque d’être gommé par tout le poids du dernier Sorrentino, Loro, sur Silvio Berlusconi, sûrement le film le plus attendu du festival.
Mais ne boudons pas notre plaisir avec une manifestation, qui, outre sa propension à s’étendre géographiquement, ajoute plusieurs cordes à son arc : des invités (dont l’actrice Barbora Bobulova, qui recevra l’Amilcar de la ville de Villerupt), concerts, expositions, rencontres, table ronde… Comme disait Fellini, encore lui, «l’art est dans l’infini détail»…
Grégory Cimatti