Le mal de mer n’épargne pas les marins, même les plus expérimentés qui s’élancent dimanche dans le Vendée Globe. Un désagrément qui risque de s’accentuer avec le… confinement et sur les bateaux nouvelle génération de ce tour du monde en solitaire et sans escale.
Un bateau qui tangue, des odeurs qui dérangent, des maux de tête, le visage qui pâlit, une sensation envahissante de mal-être, des nausées et puis les vomissements. Le mal de mer est le résultat d’un conflit de sensations, entre ce que perçoivent les yeux et ce que dit l’organe de l’équilibre situé dans l’oreille interne.
La cinétose, la dénomination médicale du mal de mer, Jean Le Cam (Yes We Cam), qui prendra le départ dimanche aux Sables d’Olonne de son 5e Vendée Globe, connaît.
« Ca m’arrive. Ca dépend des conditions. C’est surtout dans les 2, 3 premiers jours. Je vomis direct comme ça je suis pas emmerdé. C’est très rare les gens qui ne sont pas malades, c’est exceptionnel, c’est une anomalie », explique le marin.
Fraîchement arrivée sur la flotte des Imoca (monocoque de 18 m dédié au Vendée Globe), Clarisse Crémer (Banque Populaire X) en a fait la douloureuse expérience.
« En guimauve »
« Je ne l’avais quasiment pas en mini (bateau de 6,50 m) et en figaro (10 m). Là, en Imoca je l’ai quand même pas mal, ça bouge différemment », raconte la navigatrice âgée de 30 ans.
« Se retrouver avec les jambes en guimauve dans des bateaux très physiques à vomir toutes les 2 heures, avoir du mal à faire quoi que ce soit, c’est un peu désespérant. Je prends des médicaments mais ce n’est pas magique non plus ! », poursuit-elle.
Egalement bizuth sur le Vendée Globe, Armel Tripon (L’Occitane en Provence) reconnait avoir « souvent le mal de mer sur le début des courses ». « C’est le stress. Il y a une première nuit à passer. Il faut continuer à se nourrir et à s’hydrater, tu perds énormément ».
Le mal de mer peut être aggravé par l’anxiété mais aussi par le froid, la fatigue. Et peut virer au cauchemar.
« C’est des moments de souffrances pour les personnes qui subissent ça malheureusement », souligne Louis Burton (Bureau Vallée 2), épargné par le mal de mer en raison de « sa très mauvaise oreille interne ».
« J’ai parfois été avec des équipiers qui en souffraient, ça rendait compliqué les manoeuvres. Je pense que si moi j’avais ça, je ne ferai pas de course au large. On subit plus les mouvements, il y a une forme d’angoisse qui apparaît avec les vitesses et les sauts de cabri que font les bateaux », rapporte-t-il.
A quai plus longtemps
Le comportement des Imoca sur l’eau accroit le mal de mer, qui plus est, avec la nouvelle génération de la flotte, qui peut filer à des vitesses folles grâce à des foils (appendices qui élèvent la coque au dessus de l’eau).
« Ceux qui montent sur nos Imoca à foils, ça ne rate jamais, ils vomissent tout ce qu’ils peuvent. Moi non. Je ne dis pas que je ne me sens pas barbouillé mais ça vient du stress et ça passe vite », dit Sébastien Simon, skipper d’un tout nouveau voilier ‘volant’ (Arkéa Paprec).
« Ce sont des bateaux avec des réactions très particulières, un peu comme le bateau-pirate à la foire. 90% des personnes qui montent à bord et qui passent un peu de temps finissent par être malades », renchérit Thomas Ruyant (LinkedOut), à la barre d’une de ces machines.
« J’ai la chance de ne pas avoir le mal de mer, j’ai des débuts de quelque chose sur ce bateau-là mais j’ai l’impression que c’est plus un temps pour s’amariner », remarque-t-il.
Le temps de s’amariner, c’est bien ce qui va manquer à ces marins. En raison du confinement, les skippers sont restés à quai bien plus longtemps qu’ils ne l’ont jamais fait avant une course.
« Si tu navigues tous les jours, tu n’as plus le mal de mer. Si tu t’arrêtes 3, 4 jours, tu redeviens vite un terrien. Toute cette période de ‘stand-by’ avant le départ est compliquée », glisse Jérémie Beyou (Charal).
AFP