Une sculpture crue représentant une paire de fesses géantes et un train miniature qui balade les visiteurs dans une exposition : les finalistes du Turner Prize s’exposent à Londres en attendant l’annonce du lauréat de ce prestigieux prix d’art contemporain en décembre.
Les quatre artistes ont chacun pris possession d’une des salles du musée Tate Britain, qui seront ouvertes au public de mardi jusqu’au 2 janvier. Cette année, c’est le travail d’Anthea Hamilton qui devrait faire l’objet d’un vif débat. Parmi les œuvres de la Londonienne, une sculpture haute de près de cinq mètres représentant une paire de fesses -écartées par deux mains-, ainsi que des ceintures de chasteté suspendues à des chaînes. « La recherche est au cœur de son œuvre », précise Linsey Young, commissaire d’exposition à la Tate Britain. « Elle se sert de ses recherches, par exemple sur la musique disco et le lichen, comme d’un filtre pour regarder le monde. »
Une autre Londonienne, Helen Marten, expose quant à elle des sculptures réalisées avec des matériaux peu communs, tels de la peau de poisson et des cubes de craie d’ordinaire utilisés au billard. « C’est une artiste qui commence par une phase d’écriture, avant de créer d’incroyables assemblages », souligne Linsey Young. « Elle veut placer le spectateur dans la posture d’un archéologue, qu’il imagine le travail réalisé pour aboutir à ces objets. »
La troisième finaliste, Josephine Pryde, combine photographie et sculpture. Elle se sert pour cela de matériaux du quotidien, comme un plan de travail en bois blanchi par le soleil à Londres, Athènes et Berlin. Son œuvre la plus saisissante est un train miniature recouvert de graffitis réalisés par des artistes des villes où il a été exposé. « Elle aime exposer et analyser la manière dont les musées et les gens interagissent avec l’art », raconte la commissaire.
Le spectateur découvrira également le travail de Michael Dean, qui utilise notamment de l’acier, de la tôle et du sable. « Michael Dean est un sculpteur qui, lui aussi, commence par l’écriture », note la spécialiste. « Il écrit des poèmes et des textes et réalise des polices de caractères qu’il transforme ensuite en sculptures ». Au cœur de la salle qui lui est consacrée, son oeuvre la plus ouvertement politique : un îlot fait de pièces d’un penny représentant 20 463 livres (23 526 euros), une somme égale au seuil de pauvreté défini par le gouvernement britannique pour une famille de deux adultes et deux enfants.
Le Turner Prize, du nom du peintre William Turner, sera décerné le 5 décembre. Créé en 1984, est réservé aux artistes de moins de 50 ans qui résident, travaillent ou sont nés au Royaume-Uni. Réputé pour son anticonformisme -et familier des controverses-, il compte parmi ses anciens lauréats des iconoclastes comme Damien Hirst et Anish Kapoor. Pour Linsey Young, les jurés ne recherchent pas la polémique à tout prix. « Nous ne faisons pas en sorte d’être dans la provocation, assure-t-elle. Mais oui, parfois, il y a un cul géant au milieu d’une pièce. »
Le Quotidien/AFP