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Transhumance urbaine : à Paris, les brebis traversent dans les clous


Partie le 6 juillet 2019, cette transhumance urbaine a pour but de "relier les grands espaces verts" de Paris. (Photo AFP)

Des brebis couchées dans un square du XVIe arrondissement, traversant des passages cloutés, foulant le Trocadéro… une transhumance de douze jours s’est achevée mercredi en plein centre de Paris, sous les yeux de Parisiens et de touristes ébahis.

« C’est bizarre de voir des moutons ici en dehors de leur habitat naturel, explique Michelle Caba, 34 ans. Cette Dominicaine prend un selfie avec les brebis qu’elle compte partager sur les réseaux sociaux : « Je n’ai jamais vu un mouton de près, seulement dans des films ».

Après avoir dormi dans le bois de Boulogne, les moutons devaient atteindre les voies sur berge parisiennes en fin de journée, au terme d’une large boucle traversant six départements et 35 communes dont Vincennes, Ivry-sur-Seine, Sceaux et Versailles.

« Les plus belles tondeuses à gazon qu’on ait jamais vues »

Le 6 juillet, le troupeau avait quitté la verte pelouse du parc bordant la basilique de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) pour entamer un itinéraire de 140 km. L’idée était de « relier tous les grands espaces verts » et de veiller à ce qu’ils soient comestibles pour les moutons, accueillis dans la capitale par des regards amusés. « C’est formidable, ce sont les plus belles tondeuses à gazon qu’on ait jamais vues », s’exclame Philippe Advani, descendu de son appartement dès qu’il a vu les moutons dans le square Lamartine (XVIe).

« Ce qui m’intéresse, c’est de voir l’occupation de l’espace urbain par les animaux », explique Cécile Nelson, traductrice de 57 ans, venue pour le troisième jour consécutif et qui y prend « un grand plaisir ». Cette bénévole d’une association de cyclistes perçoit la transhumance comme une « action militante » face à « la voiture qui envahit l’espace urbain ».

Dans le parc à jeux, des enfants jouent, escaladent, prennent la pose pour leurs parents à quelques centimètres des moutons qui se frottent le dos contre l’installation. « Le mouton a besoin d’un temps pour ruminer. C’est vraiment un rythme à l’opposé de la ville », affirme Mélodie Brun, 31 ans, architecte paysagiste et membre de l’association Clinamen. Face aux brebis, « les gens sont enchantés. Parfois, ils les prennent pour des chèvres ou des vaches, ça nous fait sourire », poursuit-elle.

Un voyage encadré par la police

Dans les rues, la traversée des moutons est encadrée par plusieurs policiers sous les sifflements joyeux des bergers, les bêlements des brebis se mêlant aux klaxons des voitures. « Ce sont des moutons qui marchent sur les trottoirs et qui traversent aux clous », précise Vianney Delourme, cofondateur du média « Enlarge Your Paris », évoquant une « gestion paysanne adaptée à la ville ».

Régulièrement, les brebis s’alignent pour brouter le liseron devant les hôtels particuliers du XVIe arrondissement, perturbant la circulation des passants. « C’était assez drôle de voir les troupeaux de moutons qui bloquaient la sortie de métro. Nous-mêmes, en les suivant, on devient un troupeau », estime Fabrice Frigout, paysagiste et concepteur de promenades urbaines, qui suit le mouvement. La transhumance intervient en clôture des Rencontres agricoles du Grand Paris, un cycle d’une année de conférences sur l’agriculture urbaine.

L’un des objectifs était de « montrer que les moutons étaient à leur place en ville et qu’ils avaient à manger partout », explique Vianney Delourme. « Plus il y aura d’endroits où ils pourront passer, plus il y aura de la -ville nature-« , assure-t-il. Mardi, à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), l’équipe itinérante a, selon lui, tardé une heure à faire deux kilomètres. « Les moutons avaient à manger tout le temps », souligne Vianney Delourme.

Le périple de ces moutons, installés à l’année dans le parc départemental de la Courneuve, est organisé par la Métropole du Grand Paris, l’association les Bergers urbains et le média culturel en ligne « Enlarge Your Paris » pour « relier les lieux innovants en matière d’agriculture urbaine ». Tout au long de leur parcours, moutons et bergers étaient accueillis par des sites d’agriculture urbaine comme les Murs à pêches de Montreuil (Seine-Saint-Denis) ou l’école d’horticulture du Breuil de Paris.

LQ/AFP