Le Louvre Abu Dhabi a décidé de se constituer partie civile dans l’enquête sur un trafic d’antiquités pillées au Proche et au Moyen-Orient dans laquelle un ex-président du Louvre a été mise en examen, a-t-on appris lundi auprès de l’avocat du musée émirati.
« Compte tenu du scandale dont on parle aujourd’hui et dont le Louvre Abu Dhabi est la première victime, il est inconcevable que nous ne nous constituions pas partie civile », a indiqué à l’AFP Me Jean-Jacques Neuer, au nom de l’institution culturelle du plus grand émirat des Emirats arabes unis.
« Le Louvre Abu Dhabi est victime d’un trafic d’antiquités égyptiennes alors que c’est une institution culturelle phare connue du monde entier. Comme elle a une éthique impeccable sur ces sujets, elle souhaite connaître exactement ce qui s’est passé et faire toute la lumière sur ce dossier », a-t-il ajouté.
Né d’un accord intergouvernemental signé en 2007 entre les Emirats Arabes Unis et la France et lié notamment au musée du Louvre par un accord de coopération, le Louvre Abu Dhabi dépend du ministère de la Culture et du Tourisme de l’émirat d’Abu Dhabi. Il avait été inauguré en grande pompe en novembre 2017 par le président français Emmanuel Macron.
L’ex-président-directeur du Louvre Jean-Luc Martinez a été mis en examen mercredi pour « complicité d’escroquerie en bande organisée et blanchiment par facilitation mensongère de l’origine de biens provenant d’un crime ou d’un délit » et placé sous contrôle judiciaire. Il conteste les faits « avec la plus grande fermeté », selon sa défense.
Selon le Canard enchaîné, qui a révélé sa mise en cause, les enquêteurs cherchent à savoir si M. Martinez aurait « fermé les yeux » sur de faux certificats d’origine de cinq pièces d’antiquité égyptiennes acquises « pour plusieurs dizaines de millions d’euros » par le Louvre Abu Dhabi. Parmi ces pièces figure une stèle en granit rose gravée au nom du roi Toutânkhamon.
Une enquête préliminaire, confiée à l’Office central de lutte contre le trafic des biens culturels, avait été discrètement ouverte en juillet 2018 par la Juridiction nationale chargée de la lutte contre la criminalité organisée du parquet de Paris. Les investigations ont été confiées à un juge d’instruction en février 2020. Au moins trois autres personnes – un expert en archéologie méditerranéenne, un marchand et un galeriste germano-libanais – sont mises en examen dans ce dossier. Ce trafic concernerait des centaines de pièces et porterait sur plusieurs dizaines de millions d’euros, selon des sources proches à l’époque.