Signalements d’effets indésirables, pétitions, témoignages de personnalités comme Anny Duperey et Valérie Damidot… La machine s’emballe autour du Levothyrox, certains patients incriminant la nouvelle formule de ce médicament pour la thyroïde, tandis que le corps médical appelle à ne pas paniquer.
« Le vent de panique provoqué et relayé sur les réseaux sociaux et certains médias n’est pas légitime », s’est ainsi inquiété mercredi le Collège de la médecine générale dans un communiqué. Les patients présentant des symptômes inhabituels doivent « consulter leur médecin », a-t-il ajouté, avertissant que toute « décision d’arrêt intempestif du traitement » serait « dangereuse ». Une prudence relayée par l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT), qui fait écho depuis plusieurs semaines aux inquiétudes des malades, mais invite aussi à « ne jamais arrêter sans avis médical un traitement ».
Depuis la commercialisation d’une nouvelle formule en avril, cette hormone de substitution a fait l’objet de 5 000 déclarations d’effets indésirables, estime l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), précisant qu’il est encore trop tôt pour savoir combien sont réellement liées au traitement. Alors que le site internet dédié à ces signalements enregistre généralement 20 à 50 déclarations par jour, tous médicaments confondus, ce nombre a augmenté à partir du 16 août, jour de parution de plusieurs articles sur le sujet, pour atteindre un pic de 1 200 signalements le 23 août, a souligné un porte-parole de l’ANSM.
Les conclusions de l’enquête de pharmacovigilance, lancée fin mars pour surveiller l’arrivée de la nouvelle formule, ne seront connues qu’en octobre, a-t-il ajouté. Mais, assure-t-il, « pour le moment », les données disponibles n’ont « pas montré de problèmes en termes de sécurité d’emploi » de ce médicament du laboratoire Merck, prescrit à trois millions de patients en France, pour soigner leur hypothyroïdie ou suite à une ablation de la glande thyroïde.
Maux de tête, vertiges, douleurs articulaires…
Pourtant, les témoignages se multiplient de patients décrivant crampes, maux de tête et vertiges, apparus selon eux avec la nouvelle version du médicament. Plusieurs pétitions en ligne ont été lancées, dont l’une, qui réclame « que les laboratoires concernés reviennent à l’ancienne formule », a récolté près de 200 000 signatures. Dans une lettre ouverte à la ministre de la Santé, la comédienne Anny Duperey explique qu’après avoir pris sans problème du Levothyrox pour son hypothyroïdie « depuis une douzaine d’années », elle a ressenti « ces derniers mois, des malaises très inquiétants » (maux de tête, vertiges, douleurs articulaires, faiblesse musculaires, problèmes digestifs, etc.), qu’elle a associés au changement de formulation après avoir vu la pétition en ligne. L’animatrice Valérie Damidot a elle assuré sur Twitter vivre « la même galère » et réclamé des « réponses concrètes ».
La ministre de la Santé Agnès Buzyn a annoncé mercredi qu’elle recevrait dans l’après-midi les associations de patients concernées, pour faire un point sur la situation. Fin août, l’ANSM a mis en place un numéro vert pour répondre aux inquiétudes des patients. Après avoir reçu jusqu’à 50 000 appels le lendemain de son ouverture, la ligne répond encore à 2 000 à 5 000 patients par jour, selon l’agence sanitaire.
Le changement de formule, intervenu à la demande de l’ANSM, visait à garantir une teneur en substance active plus stable, tout au long de la durée de conservation du médicament. Les modifications ne concernent pas le principe actif (la lévothyroxine) mais les substances qui lui sont associées (les excipients). Le lactose, mal toléré par certains, a ainsi été remplacé par le mannitol, une substance « dépourvue d’effet notoire à la dose utilisée », et de l’acide citrique anhydre a été ajouté, pour « limiter la dégradation de la lévothyroxine au cours du temps », a détaillé le Collège de la médecine générale. Le laboratoire Merck a fourni des études « montrant que la nouvelle version était équivalente en termes de sécurité et d’efficacité », assure aussi l’ANSM.
Le Quotidien/AFP