Dernière grande création grand-ducale de la saison, « Wow » de et avec Eugénie Anselin, arrive au théâtre des Casemates, en allemand, avant de déménager au TOL, la semaine prochaine en VF.
« Aujourd’hui c’est devenu presque un réflexe de dire wow », lance la comédienne et auteure Eugénie Anselin en introduction de sa nouvelle création éponyme, mise cette fois-ci en scène par Antoine Morin. Elle poursuit : «On le dit sans trop s’en rendre compte, on peut le mettre un peu partout, comme avant on pouvait dire ‘cool’. Je ne m’en rendais pas compte avant de travailler sur ce spectacle, mais en fait, je le dis très souvent.» Bref, une onomatopée, tirée des réseaux sociaux devenue une sorte de phénomène générationnel !
Les réseaux sociaux, justement il en est question dans cette création. Après tout, sur Facebook, Twitter et ailleurs, tout un chacun se met en scène. Se prend en selfie. Ne montre que son bon profil. C’est d’ailleurs ce que fait Eugénie Anselin ici sur scène. Enfin, son personnage… «Ce n’est pas du stand-up parce que ce n’est pas Eugénie Anselin qui tchatche sur sa life, c’est un personnage, il y a un arc narratif. C’est une pièce et on suit ce personnage tout le long, c’est donc plutôt un monologue ou un seul en scène.» Elle ajoute : «Après, bien sûr, comme c’est moi qui ai écrit le texte, on y trouve beaucoup de choses inspirées de ma vie, qu’on exagère pour la scène. Un peu comme dans ce j’avais déjà fait dans Attention, chantier en cours !»
L’obsession d’être toujours « plus tout »
Mais il n’est pas du tout ici question d’une suite. De la bataille intergénérationnelle, l’artiste passe ici à la bataille intragénérationnelle. «Nous seront bientôt 7,6 milliards d’êtres humains à avoir pris place à bord de notre planète, ce grand manège qui tourne de plus en plus vite ! (…) la concurrence s’annonce dure», précisent la comédienne et le metteur en scène dans leur note d’intention. «Il y a de plus en plus de concurrence, dans tous les domaines, pas seulement dans le domaine artistique. Du coup, il faut de plus en plus se montrer, prouver qu’on est ‘plus’ que les autres; il faut être un winner !», précise l’auteure. Plus ? «Oui, plus ! Plus tout ! Plus rapide, plus fort, plus réactif, plus qualifié, plus beau, plus connecté, plus liké… Bref, il faut être wow», souligne de son côté le metteur en scène.
Alors, schizophrène cette génération smartphone ? Pas nécessairement. Mais en tout cas, on a inventé pour elle un nouveau mot : la nomophobie, autrement dit la phobie liée à la peur excessive d’être séparé de son téléphone mobile.
Dans cette nouvelle société du paraître, hyperconnectée, où on semble s’ennuyer dès qu’on se retrouve seul deux minutes, où on cherche en permanence le regard de l’autre et où le smartphone semble devenu un appendice de notre corps, tout s’accélère, assurent les deux artistes. Tout est public. Du coup, on a tendance à s’oublier, à oublier de profiter de l’instant, à oublier d’être heureux, vraiment heureux, tient à nous rappeler Wow.
Un spectacle joué en allemand, cette semaine au théâtre des Casemates, puis en français, la semaine prochaine au TOL.
Pablo Chimienti